Redevances sur les droits de place dans les marchés de Lokossa: fraude sur les tarifs des tickets
Dans les marchés de Lokossa, les usagers payent leur droit de place chaque jour de marché par des agents collecteurs recrutés à cet effet. Malheureusement, certains collecteurs délivrent des tickets non datés ou des tickets à prix non correspondants aux étalages, causant ainsi un manque à gagner de 200 francs par jour d’animation du marché Nesto d’Almeida (soit un gap d’environ 144.000f pour un seul marché).
Jean Anato, chef division équipement marchand de la commune de Lokossa, reconnaît la récurrence d’actes de fraudes par les agents collecteurs sous son autorité. « Je ne peux pas dire non, souvent, très souvent, il arrive des cas comme ça et la raison est soit l’usager a supplié le collecteur ou l’usager estime qu’il y a de mévente ». Toutefois, il soutient que quand la mairie est informée, « l’agent fautif est puni parce que ces clauses ne sont pas contenues dans le contrat et c’est le comité de suivi de la gestion des marchés qui punit l’agent », confie Jean Anato se fondant sur la délibération du conseil communal no 96/66/CCL du 29 novembre 2019 précisant le taux de pourcentage de ristourne aux agents collecteurs, de l’arrêté no 96/024/CL/DSF/SA du 3 mai 2018 nommant les 14 agents colleteurs et de l’arrêté no 96/065/CL/SG/DSF/SREM/SA du 8 octobre 2016 stipulant les sanctions encourues par les collecteurs indélicats. En son article 5 du dernier arrêté sus cité, on peut retenir: « des sanctions disciplinaires sont prévues à l’encontre des collecteurs en cas d’ivresse lors de l’accomplissement de leurs tâches, de malversation ou de non-convenance des tickets délivrés. Ces sanctions varient d’une suspension temporaire à l’exclusion définitive selon la gravité de l’acte posé ». Le témoignage d’Anato est battu en brèche par Jacques Amoussou, directeur des services financiers de la mairie de Lokossa : « nous n’avons jamais pris un acte sanctionnant un agent collecteur pour cas de fraudes et j’en ai jamais rencontré, en tout cas, pas à ma connaissance, mais pour se passer d’un agent impliqué ou soupçonné de fraude fiscale, nous l’évitons tout simplement en ne mettant plus de valeurs inactives (tickets) à sa disposition ». Pour lui, la baisse des recettes dans les marchés n’est pas forcément liée à la fraude. « La baisse des recettes fiscales est due au poids de l’âge des agents collecteurs qui sont en grande majorité des personnes âgées (…) Ils éprouvent de la peine à délivrer de valeurs inactives à tous les usagers en période de pluie à cause de l’état de nos marchés, la morosité économique ou la mévente sont aussi des raisons de la baisse des recettes. La vétusté de l’équipement marchand peut être aussi un frein de la baisse des recettes fiscales dans les marchés », a renchéri Jacques Amoussou. À la lecture de ces arrêtés et délibérations, l’on est en droit de se demander la raison laquelle, le directeur des services financiers de la mairie de Lokossa, Jacques Amoussou, préfère se passer des agents soupçonnés de fraude ou violant les règles du contrat. Mieux, le conseil communal qui a décidé confier cette mission de collecte des recettes locales aux agents retenus ne maitrise-t-il pas la complexité du travail ? « Les agents collecteurs sont des agents occasionnels qui sont payés sur 15% de leur recouvrement mensuel, donc il nous est difficile d’entreprendre de poursuites judiciaires contre eux en cas de violation d’une des clauses du contrat », a confié Jean Anato, chef division équipement marchand de la commune de Lokossa, d’un air contrarié. « Aucun texte ne nous permet de sanctionner les agents collecteurs fautifs puisque nous n’avons pas un contrat formel avec eux et mieux, ils ne sont pas agents de la mairie », se contredit Jacques Amoussou au vu des arrêtés précités. Nos tentatives pour recueillir le témoignage d’Antoine Sonou, receveur percepteur de la commune de Lokossa, sur les cas d’agents fautifs ont été vaines, mais il a paradoxalement accepté retracer le mécanisme qui rend un ticket opérationnel.
Mécanisme d’opérationnalisation des valeurs inactives
« Nous avons 3 catégories de tickets : les tickets de 50 francs, de 100 francs et de 200 francs, mais en période pluie où il y a assez d’orages, il y a aussi des tickets de 300 francs et de 500 francs. Les tickets de 50f concernent les produits non consistants notamment les légumes, les noix de palme, les piments et les tickets de 100f sont délivrés pour les divers et aux vendeuses de farine Les tickets de 200 f concernent les céréales en tenant compte de l’étalage et de l’espace occupé. Il existe un comité de gestion des marchés constitué des sages, des agents de la mairie et des usagers du marché. La délivrance des tickets se fait par les 14 agents collecteurs sélectionnés par la mairie tous les jours du marché et qui travaillent de façon rotative », a expliqué Jean Anato, chef division équipement marchand de la commune de Lokossa. « Dans la matinée de chaque jour de marché, nous mettons les valeurs inactives à la disposition des agents collecteurs et le soir, ils me font le point que je transmets automatiquement au régisseur de la mairie. Le comité de suivi fait des contrôles inopinés réguliers. Le régisseur des recettes de la mairie prend les tickets auprès du receveur percepteur de la commune et les met à ma disposition, moi je les place à travers les agents collecteurs qui me font le point et je reverse au régisseur qui transmet au receveur » a-t-il ajouté. Le receveur percepteur de Lokossa, Antoine Sonou, revient sur le mécanisme qui conduit à la confection des valeurs inactives règlementairement opérationnelles. La commission de passation de marché public présidé par le maire saisit le receveur percepteur pour la commande de valeurs inactives et le receveur percepteur, à son tour saisi le prestataire retenu pour lancer la commande, une fois les tickets prêts, le receveur percepteur fait la réception des commandes en présence des membres de la cellule de passation de marché installés pour la cause et pour rendre les valeurs inactives opérationnelles, le receveur percepteur saisit le receveur des finances du département pour le poinçonnage , une fois les tickets poinçonnés, ils me sont renvoyés et je les mets à la disposition du régisseur de la mairie compte tenu de la demande ; lui, à son tour les place au chef division gestion des équipements marchands afin qu’ils soient destinés aux agents collecteurs. Un point trimestriel de la vente des tickets m’est fait. Nous faisons également des visites inopinées pour s’assurer que seuls les tickets poinçonnés sont délivrés dans les marchés de Lokossa » a informé Antoine Sonou.