Sommet IDA-20 à Abidjan : Talon prend une part active aux travaux
Plusieurs chefs d’Etats Africains dont celui du Bénin ont pris part ce 15 juillet 2021 à Abidjan à la réunion de Haut niveau sur la 20e Reconstitution des ressources de l’Association Internationale du Développement (IDA-20).
Selon un compte rendu de cette rencontre au sommet publié sur le site du de la présidence de la République, elle a pour objectif de mobiliser 100 milliards de dollars US avant la fin de l’année 2021. Des fonds qui serviront à soutenir une relance de l’économie post-Covid-19 et aider les pays africains à poursuivre leur transformation économique. Évidemment, tous les pays du Monde et ceux d’Afrique ont subi les conséquences de cette grave crise sanitaire à tous les niveaux, surtout au plan économique. Il faut donc trouver des solutions urgentes et efficaces pour redonner du souffle aux pays.
Le président Béninois Patrice Talon qui a pris une part active aux travaux, a comme à ses habitudes lors de ces genres de rencontres, délivré un discours éloquent et très apprécié par ses pairs. Une fois encore, il s’est illustré de la plus belle des manières. Nous y reviendrons.
Louis Tossavi
Intégralité de la « Déclaration d’Abidjan
Vingtième (20ème) Reconstitution Ambitieuse des Ressources de l’Association Internationale de Développement (IDA20)
Abidjan – 15 juillet 2021
Préambule
- Nous, les Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Angola, du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, de l’Ethiopie, du Ghana, de la Guinée, de la Guinée Bissau, du Libéria, de Madagascar, de la Mauritanie, du Mozambique, du Niger, du Nigéria, de l’Ouganda, de la République Démocratique du Congo, du Rwanda, du Sénégal, du Soudan, de la Tanzanie et du Togo, nous sommes réunis à Abidjan, République de Côte d’Ivoire, le 15 juillet 2021.
- Nous remercions Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, pour l’initiative de cette importante rencontre et pour nous avoir accueilli dans l’hospitalité Africaine, afin de discuter des défis communs de développement de nos pays, de convenir d’objectifs et de buts communs en vue de guider la relance économique de nos pays, et de discuter du rôle essentiel du financement extérieur notamment à travers une reconstitution ambitieuse des ressources de l’Association Internationale de Développement (IDA), dans un contexte marqué par la pandémie de la COVID-19.
- Nous exprimons nos remerciements à l’ensemble de nos partenaires et aux pays donateurs pour les actions déjà réalisées et l’intérêt manifesté pour la 20e reconstitution de l’IDA, instrument capital pour les pays d’Afrique Sub-Saharienne (ASS) pour financer une économie africaine inclusive et durable pour le bien-être de ses populations.
- Nous saluons la politique du Groupe de la Banque Mondiale, qui consiste à promouvoir un esprit collaboratif manifesté par l’écoute, la compréhension, et le partage des défis, pour mieux accompagner les États dans la mise en œuvre de leurs stratégies nationales, à travers des financements et instruments adaptés aux besoins, comme en témoigne cette initiative d’Abidjan.
- Le présent document, « Déclaration d’Abidjan », représente le résultat de nos discussions et devrait constituer un cadre de référence pour la priorisation des interventions du Groupe de la Banque Mondiale au cours des années à venir.
Évolutions économiques et sociales récentes et défis liés à la relance COVID-19
- L’Afrique Sub-Saharienne (ASS) a connu en 2020 la contreperformance économique la plus importante jamais enregistrée depuis plusieurs décennies, en raison de la crise mondiale due à la pandémie de la COVID-19. Le taux de croissance économique de la région s’est établi à -1.9% en 2020 selon le dernier rapport sur les perspectives économiques régionales du Fonds Monétaire International contre 3.6% initialement prévu. La pandémie a fortement affecté les indicateurs sociaux et a freiné les progrès entamés dans la marche vers l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD) de 2030 ainsi que ceux de l’Agenda 2063 de l’Union Africaine. L’emploi a reculé́ d’environ 8.5% en 2020, et plus de 32 millions de personnes ont basculé dans l’extrême pauvreté.
De même, les progrès dans le renforcement du capital humain, notamment dans la réduction des inégalités spatiales et de genre ont été ralentis, en raison de la fermeture d’écoles, laquelle aurait affecté près de 253 millions d’élèves, entraînant des pertes d’apprentissage et de formation. La crise a davantage exposé certaines vulnérabilités de l’Afrique, notamment au niveau de la sécurité alimentaire, de l’accès aux médicaments et aux vaccins notamment contre la COVID-19, et de l’industrialisation.
- A la pandémie de la COVID-19, et ses impacts économiques, sanitaires, et humanitaires, s’ajoutent la crise sécuritaire subie par plusieurs pays d’Afrique Sub-Saharienne, son risque d’expansion et la nécessité pour les États d’y consacrer des ressources importantes souvent au détriment d’autres dépenses de développement. Ces problèmes sont susceptibles de conduire à une augmentation des conflits et de la violence, et d’aggraver la fragilité et l’instabilité dans la région. Conscient de ce que la pauvreté et la précarité font partie des principales causes de terrorisme et de migration dans le monde, nous devons faire face à ces défis.
- Les contraintes budgétaires et de trésorerie se sont accentuées pour les pays de la région, entrainant un accroissement de notre endettement notamment non concessionnel. Alors que les capacités de mobilisation de recettes fiscales ont été confrontées à la fermeture de nombreuses entreprises ou à la baisse drastique d’activités, les investissements directs étrangers se sont amenuisés et les dépenses immédiates pour faire face à la crise sont devenues plus importantes.
- Plusieurs pays du monde ont lancé de vastes plans de relance, en utilisant, à grande échelle, les instruments monétaires et budgétaires dont ils disposent pour lutter contre les effets néfastes de la COVID-19. En revanche, la plupart des pays Africains ne disposent pas d’instruments similaires.
- Compte tenu du besoin additionnel de financement en Afrique Subsaharienne, estimé à $285 milliards sur les cinq prochaines années, notamment pour lutter contre la pandémie et le dérèglement climatique, et accélérer la reprise économique, les pays Africains doivent adopter une stratégie soutenable de financement de leur développement incluant, outre leurs efforts propres de mobilisation des ressources domestiques, la mobilisation de financement concessionnel et non concessionnel, et le secteur privé.
- Ce contexte particulièrement difficile milite en faveur d’une plus grande solidarité de l’ensemble de nos partenaires et d’une réponse adaptée et flexible, qui intègre d’une part des solutions aux contingences de court terme, en matière sociale, économique et sécuritaire, et d’autre part, le soutien adéquat aux politiques de restauration de la dynamique de croissance économique et de réduction de la pauvreté ainsi que des inégalités.
Priorités pour une meilleure reprise en Afrique
- C’est donc le moment d’AGIR et les ressources de l’IDA doivent nous permettre de relancer nos économies ainsi que le processus de développement pour aider nos populations à se remettre de l’impact de la COVID-19, repenser collectivement nos approches de développement et nous concentrer sur les obstacles les plus critiques qui empêchent une reprise verte, résiliente et plus inclusive. Sachant que la plupart des personnes qui retomberont dans l’extrême pauvreté sont celles qui ont un faible niveau d’éducation, ont des emplois vulnérables ou sont déjà en situation précaire touchées par les sécheresses et les autres calamités climatiques, nous ciblons nos actions sur trois (3) thématiques majeures, à savoir (i) l’amélioration du capital humain, (ii) la création d’emplois par des politiques de développement du secteur privé et (iii) la relance économique.
- Investir dans le capital humain et le protéger seront essentiels pour reconstruire une économie à productivité élevée, inclusive et plus résiliente. Cela implique l’amélioration des systèmes sanitaires, éducatifs, ainsi que l’insertion socio-professionnelle des jeunes par la qualité de la formation professionnelle et de l’enseignement technique. Notre devoir est de protéger nos populations des chocs futurs par des filets de sécurité robustes et adaptables, ainsi que des systèmes de prestation de services résilients. Outre l’amélioration de l’accès aux vaccins contre la COVID 19, nous souhaitons que l’IDA 20 offre la possibilité d’une consolidation des acquis en matière de capital humain, afin de parvenir à une véritable transformation humaine de nos populations. Dans ces domaines, l’introduction du digital constituera un accélérateur et un moyen transversal d’optimisation des ressources financières et humaines. Elle aidera notamment au développement de la télémédecine dans les zones reculées et du télé-enseignement, permettant de réduire les inégalités spatiales. Il est ainsi nécessaire d’accroître les investissements dans des systèmes accessibles, intégrés et résilients, en mettant l’accent sur la couverture sanitaire universelle, l’adaptation des marchés du travail, l’école de la seconde chance et l’éducation des jeunes filles.
A cet égard, le développement de la formation professionnelle et son alignement avec les besoins, dans une approche régionale permettant de couvrir tout le territoire, seront des atouts clés. Cela permettra de réduire les proportions de jeunes femmes et hommes sans perspective d’insertion professionnelle durable.
- Nous voulons promouvoir la création d’emplois par le développement du secteur privé, acteur clé de la transformation de nos secteurs économiques stratégiques. Le défi du développement du secteur privé exige la poursuite et l’amplification des efforts d’amélioration du climat des affaires, et d’importants investissements pour accroître l’offre énergétique, y compris l’accès et la réduction des coûts pour les populations et les entreprises. Il requiert également l’accélération du dynamisme de l’économie numérique, ainsi que des réformes et programmes aptes à stimuler la mise en place de facteurs de production et des investissements verts, résilients et inclusifs du secteur privé.
Nous pensons spécifiquement au développement de l’Agro-industrie, au renforcement du secteur manufacturier, à la fabrication de produits pharmaceutiques, et à la production de vaccins en Afrique à travers des partenariats industriels, le transfert de technologie, et un partage de la propriété intellectuelle. Nous visons l’intégration de nos filières aux chaînes de valeurs internationales et le renforcement des échanges intra-africains, afin de capter une part plus importante de valeur ajoutée, indispensable pour l’amélioration du niveau de vie et du bien-être des populations. Les allocations IDA doivent ainsi permettre d’accroitre notre accès à des volumes plus importants de ressources financières, à des conditions favorables, grâce notamment à la mise en place de mécanismes de financements innovants et compétitifs, comme les mécanismes de « blending » et des garanties adossées aux ressources de l’IDA.
- La relance économique est une priorité. Notre région doit rapidement sortir de la crise, pour entamer la dynamique vertueuse d’amélioration des indicateurs économiques, sociaux, et de bien-être des populations. Elle impliquera la transformation structurelle et spatiale de nos économies, à travers la transformation de nos matières premières, une meilleure diversification économique, un développement des échanges intra-pays, de même que le renforcement de la coopération entre nos États, notamment grâce à la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine. Les pays Africains ont besoin, à l’instar de tous les pays du monde, d’espace budgétaire adapté pour faire face à la crise, et relancer leurs économies sans toutefois remettre en cause la soutenabilité de la dette et la stabilité du cadre macroéconomique auxquelles nous sommes particulièrement attachés. Nous soutenons à ce titre toutes les initiatives visant à améliorer l’accès des pays africains à des ressources longues et à des conditions intéressantes. La restauration de la croissance économique doit s’accompagner du développement d’un système d’anticipation des crises, afin de protéger les économies et les populations d’éventuelles pandémies, de crises humanitaires, de catastrophes naturelles et de l’insécurité alimentaire. Ainsi, l’IDA peut aider à renforcer les systèmes nationaux de base de prévention des crises, notamment climatiques et alimentaires, et les politiques d’amélioration de la productivité agricole, particulièrement à travers un meilleur accès aux semences, aux fertilisants et aux équipements pour la mécanisation.
- La spécificité de notre région commande qu’en plus des trois (3) axes prioritaires évoqués ci-dessus, les questions liées à la sécurité, à la fragilité et à la paix soient considérées comme des préalables à une relance économique durable. En effet, nous devons continuer à lutter contre la radicalisation et le terrorisme avec efficacité. A cet égard, il est important, dans le cadre des appuis de l’IDA, de développer des programmes régionaux de développement, visant en particulier, les jeunes et les femmes, pour mettre en place un ensemble d’infrastructures et d’activités génératrices de revenus viables. Cette approche systémique pourrait s’intégrer dans la dynamique de développement régional équilibré et de gestion harmonisée des zones frontalières exposées à la fragilité.
- Ceci est un programme ambitieux mais réalisable pour l’Afrique. Un programme, qui nécessite d’importantes ressources intérieures et extérieures, et qui nous permettra d’atteindre les Objectifs de Développement Durable notamment
(i) éliminer, d’ici 2030, complètement l’extrême pauvreté en Afrique subsaharienne,
(ii) faire en sorte que chacun bénéficie d’une couverture sanitaire universelle et à moindre coût,
(iii) accélérer la production locale de médicaments et de vaccins,
(iv) parvenir, d’ici 2030, à l’accès universel à l’électricité et à l’eau,
(v) garantir, d’ici 2030, un accès à une éducation de qualité à tous les enfants de moins de 16 ans, et augmenter significativement la proportion d’adultes alphabétisés,
(vi) augmenter le nombre de jeunes et d’adultes disposant des compétences, notamment techniques et professionnelles, nécessaires à l’obtention d’un emploi et à l’entrepreneuriat,
(vii) promouvoir des politiques favorisant l’innovation et le développement des petites et moyennes entreprises,
(viii) promouvoir l’industrialisation de nos économies notamment à travers la transformation locale des matières premières.
- Pour ce faire, Nous :
a. Réitérons notre appel lancé lors du Sommet sur le financement de l’Afrique à Paris du 18 mai 2021, pour un soutien accru au continent en vue de mieux se reconstruire après la crise découlant de la pandémie de COVID-19.
b. Exhortons les donateurs de l’IDA à soutenir une reconstitution ambitieuse et importante des ressources de l’IDA20 pour une mobilisation d’au moins 100 milliards USD d’ici la fin de l’année 2021, afin d’atteindre les objectifs énoncés dans la présente déclaration.
c. Travaillerons à améliorer significativement notre capacité d’absorption des ressources pour une exécution diligente des projets et programmes.
d. Nous engageons à poursuivre les efforts de mobilisation des recettes fiscales, et à utiliser de façon transparente et efficiente les ressources mobilisées, tout en renforçant la gouvernance.
Réunion des Chefs d’État et de Gouvernement pour soutenir une vingtième (20ème) reconstitution ambitieuse des ressources de l’Association Internationale de Développement (IDA20)
Abidjan – 15 juillet 2021
République de Côte d’Ivoire
Liste des participants à la réunion ayant adopté la déclaration
Pays : Angola, Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Ethiopie, Ghana, Guinée, Guinée Bissau, Libéria, Madagascar, Mauritanie, Mozambique, Niger, Nigéria, Ouganda, République Démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Soudan, Tanzanie et Togo
Ainsi que le Président de la Commission de l’Union Africaine, le Président de la Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le Président de la Commission de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC), le représentant du Président de la Commission de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et le Groupe de la Banque Mondiale.