Stigmatisation par la société des mères célibataires: une « arme sur la tempe » des épouses battues

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(La peur d’être jugée par, une ‘’prison’’ pour les victimes de VBG)

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Être mère célibataire au Bénin et en Afrique de façon générale, peut être très mal perçu par la société. Dans le cadre de la célébration de la Journée internationale de la femme africaine, une immersion dans la vie de certaines femmes au foyer nous a permis de comprendre le calvaire qu’elles vivent et les véritables raisons qui les maintiennent encore dans ces ménages toxiques.

La norme sociétale place la femme, notamment la mère à une place de choix. La voir en dehors de cette sphère suscite souvent beaucoup de polémiques. Ce regard désapprobateur de la société contraint de nombreuses femmes au foyer à subir des violences psychologiques et physiques de la part de leurs maris.
« Mes parents et mes amies m’ont déjà demandé à plusieurs reprises de le quitter parce qu’il me frappe. La dernière fois, ce sont nos voisins qui sont venus me secourir. J’ai failli y laisser ma peau. J’ai envie de le quitter, mais j’ai peur de ce que les gens diront de moi », nous a confié Martine, une jeune femme de la trentaine. Comme elle, nombreuses sont les femmes qui souffrent le martyre dans leurs ménages, incapables de quitter leurs bourreaux à cause du regard de la société.
Fort heureusement, de nos jours, il existe plusieurs organisations non gouvernementales et associations qui mènent une lutte farouche contre les violences faites aux femmes. Des séances de sensibilisation sont organisées de part et d’autre pour toujours leur suggérer les démarches à suivre en cas de violences. De même, les potentiels auteurs et leur entourage sont également sensibilisés sur les questions de prévention et de prise en charge des violences basées sur le genre.

Les causes cachées du silence de certaines femmes

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La grande question qui revient presque toujours sur la table est de savoir la raison pour laquelle le mal persiste toujours et les femmes continuent de subir sans généralement se plaindre. La réponse peut se trouver dans le comportement des proches des victimes de violences conjugales. Si les parents de dame Martine, qu’on a citée plus haut, ont suggéré à leur fille de rejoindre la maison familiale avec ses trois enfants, Mounirath, elle, n’aura pas les mêmes chances. Face aux coups répétés de son mari, elle s’est déjà enfuie plus d’une fois pour rejoindre ses géniteurs. Mais ceux-ci, intransigeants, lui ont ordonné de retourner dans son foyer. Ménagère et n’ayant aucune source de revenus, elle ne peut compter que sur la bonne humeur de son époux pour vivre quelques jours de paix. « Je n’ai nulle part où aller. J’ai déjà supplié mon père une fois quand mon mari m’a cassé le bras en me battant. Mais il m’a dit de supporter, que ce sont les réalités du mariage. Il m’a rappelé que nous sommes musulmans et qu’il ne veut en aucun cas subir la honte d’entendre nos proches dire qu’il n’a pas bien éduqué sa fille. Je n’ai pas non plus de travail. Je ne peux pas louer et prendre en charge les enfants », a-t-elle laissé entendre en sanglots. À la question de savoir si elle pourrait divorcer si elle trouve les moyens financiers nécessaires pour se prendre en charge avec ses enfants, sa réponse est des plus étonnantes. « J’y réfléchirai au moment venu. Parce que, j’ai peur aussi que mes amies et mes proches me traitent de prostituée. Mes parents sont capables de me renier », a-t-elle avoué le regard triste et perdu.

Des considérations sociales et culturelles suicidaires…


Très souvent, les femmes victimes de violences conjugales sont non seulement diffamées et marginalisées, mais aussi incriminées quand elles décident de quitter leur ménage. Ce qui parait curieux est que les parents, amies, proches et voisins qui leur recommandent de faire leurs bagages sont souvent les mêmes à les traiter de femmes de mœurs légères, incapables de rester sous le toit d’un homme.
Darius Vegba, sociologue du développement et spécialiste du genre parle de la stigmatisation des mères célibataires dans nos sociétés. « Cette question réfère à la problématique de la perception du mariage dans notre société. Le mariage est considéré comme une institution sociale de rang très élevé en Afrique au point où même les hommes non mariés n’ont pas les mêmes considérations que ceux en couple. En effet, les mères célibataires sont perçues comme des personnes anormales. La stigmatisation est plus prégnante à l’endroit des femmes que des hommes. La société est plus indulgente vis-à-vis des hommes célibataires que des femmes célibataires. On ne conçoit pas que des évènements ou des facteurs puissent arriver dans la vie, pour qu’une femme vive célibataire surtout avec des enfants. Il faut noter qu’il y a une distinction entre les hommes célibataires avec enfants et les mères célibataires avec enfants. Il y a des activités que les femmes mènent qui contribuent à la vie du foyer et à la vie de la communauté. Donc, prenant référence à cette considération de sexe faible qui lui est attribuée, quand elle est mère célibataire, on lui colle l’étiquette d’une personne qui ne respecte pas les normes de la société. On considère qu’elle a commis un impair, une faute pour se retrouver avec un enfant sans homme alors que dans le fond, il y a plusieurs paramètres qui peuvent conduire une femme à demander le divorce », a-t-il expliqué.
Pour lui, c’est pour éviter ce genre de jugement que beaucoup de femmes préfèrent se taire et subir toutes les formes de maltraitance que leur infligent leurs partenaires. « C’est fuyant ce genre de regard, ou la peur de ce genre de regard, la peur d’être considérée d’avoir commis une faute pour se retrouver dans ce statut de mère célibataire qui parfois amène les femmes à supporter les travers et les mépris d’une union qui ne fonctionne plus. Les parents de la femme même quelquefois qui lui disent ne pas vouloir entendre, quel que soit le degré de souffrance qu’elle a divorcé ou qu’elle a quitté ou a le projet de quitter son homme » a-t-il clarifié.

Quelques pistes de solutions pour ces femmes battues et ces mères célibataires


Darius Vegba, le sociologue que nous avons interrogé a néanmoins recommandé aux femmes qui sont dans ces cas, de se rapprocher des autorités compétentes pour se faire assister et ne pas avoir peur du regard et du jugement de la société sur leur nouveau statut. « Sur les questions d’égalité et du genre, il y a beaucoup de travaux qui se font, beaucoup d’activités qui se mènent aujourd’hui avec plusieurs associations de défense des droits des femmes. C’est vrai qu’il y a certaines femmes qui par manque d’informations, ne savent pas qu’elles ont la possibilité de saisir des instances sociales judicaires pour bénéficier d’un apport. Je leur recommande de se rapprocher de ces institutions pour dénoncer leurs bourreaux. Pour la suite, je leur conseille de rester focus sur leurs objectifs de vie, ce qu’elles veulent pour elles-mêmes et les défis qu’elles se sont fixé. Ceci étant, le poids de la stigmatisation devient bien assez léger. Au demeurant, la femme victime de stigmatisation peut porter plainte à des moments donnés, si elle juge qu’une atteinte est portée à sa vie privée et à son honorabilité », a martelé le sociologue pour conclure.
Dans une société qui est à couteau tiré entre tradition et modernité, le divorce continue d’être considéré comme une déviance. Cependant, en dépit de cette pression sociale, les femmes qui sont victimes de violences conjugales ne doivent plus s’embrigader dans des unions qui les empêchent de s’épanouir. Sans toutefois cautionner le divorce comme première solution aux difficultés du couple, il est souhaitable que les organisations non gouvernementales et les institutions qui défendent les droits des femmes encouragent ces dernières à ne plus avoir peur des diverses interprétations et stigmatisations de la société, car ce qui compte est leur épanouissement et le bonheur de leurs enfants.

Justelaine Akefouin (Stg)
Légende : Femme stigmatisée

SWEDD

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