Mise en œuvre de la réforme du secteur de la décentralisation/SE : une carence technique fâcheuse dans certaines communes
La loi n°2021-14 du 21 octobre 2021 portant code de l’Administration territoriale en République du Bénin est entrée en vigueur depuis quelques semaines. Tout a été minutieusement préparé. Le terrain a même été balisé pour donner toutes les chances à la réforme structurelle du secteur de la décentralisation au Bénin de procurer le bonheur aux populations. Le 28 janvier 2022, la Convention de partenariat Gouvernement- Communes a été signée par le ministre d’État chargé du Développement et de la Coordination de l’Action Gouvernementale, Abdoulaye Bio Tchané et le Président de l’Ancb, Luc Sètondji Atrokpo. L »objectif visé par cette convention, est de tracer un cadre de coopération et de transparence pour une mise en œuvre efficace de la réforme structurelle du secteur de la Décentralisation telle qu’en dispose la loi N° 2021-14 du 20 décembre 2021 portant Code de l’Administration Territoriale du Bénin. Un peu plus tôt, le ministre de la Décentralisation et de la Gouvernance locale, Raphaël Akotègnon, a expliqué le bien-fondé de la réforme. « Contrairement aux idées répandues dans l’opinion publique, la réforme est initiée pour renforcer et dépolitiser l’Administration communale. Les communes conservent la plénitude de leurs compétences. Le maire demeure la première autorité politico-administrative de la commune. Il est renforcé dans sa position par l’instauration d’un nouvel organe dénommé le Conseil de supervision composé du maire, des adjoints aux maires et des Présidents de commissions permanentes, désormais au nombre de quatre (4) dans toutes les communes. Cet organe présidé par le maire adopte les documents budgétaires et de planification du développement local avant leur soumission au Conseil communal pour validation. Un secrétaire exécutif sera nommé par arrêté du Maire après tirage au sort dans le fichier national des principales fonctions administratives de mairie », a expliqué dans l’Alibori, le jeudi 25 novembre 2021, Raphaël Akotègnon lors d’une tournée d’échanges et d’explication dans les communes au Nord. Depuis les choses ont bougé. Les Secrétaires Exécutifs (SE) et les cadres techniques ont été sélectionnés à l’issue d’une phase de composition et de tirage au sort. Moins de cent (100) jours après la prise de fonctions des secrétaires exécutifs, des craintes légitimes et justifiés ont émergé. En effet, les nouveaux SE sont des patrons de l’Administration communale. Le législateur a même fait d’eux des ordonnateurs du budget. Cette innovation n’avait pas manqué de susciter des mécontentements chez certains maires. Mais les critiques avaient été levées par le gouvernement qui a expliqué sa volonté de séparer les fonctions politiques de celles techniques dans les communes. Mais alors, quelle est la qualité de la production de ces Secrétaires Exécutifs désormais patrons de l’Administration communale ? Si le processus ayant abouti à leur choix dans les 77 communes du Bénin a été mesuré à la hauteur de critères précis et des attentes, les premiers pas de certains SE font déjà douter certains observateurs avertis et en premier, certains élus communaux et certains maires qui sont dans des rapports de collaboration directe avec ces Secrétaires Exécutifs. En effet, au niveau de certaines communes, certains SE semblent se mélanger les pédales avec des lacunes dans la gestion des affaires réputées basiques. Le moins que l’on puisse dire est que nombre d’entre eux n’étaient pas au sein des communes. Des cadres au profil bien taillé, certes, mais beaucoup de Secrétaires Exécutifs n’ont jamais fait leur expérience professionnelle dans l’Administration communale pour en maîtriser les modes opératoires et les spécificités. Les collectivités territoriales étant des entités particulières, la gouvernance administrative répond à des spécificités connues. Du coup, beaucoup de Secrétaires Exécutifs sont dépaysés et se retrouvent en train de chercher leurs repères dans un monde qu’ils n’avaient jamais connu et dont ils ont seulement entendu parler. Selon certaines sources contactées dans plusieurs communes, certains Secrétaires Exécutifs n’ont pas été capables de dresser, selon les normes et formats standards, un simple procès-verbal de session communale. À cela, les sources renseignent qu’il y a une foule de maladresses et/ou d’incompréhensions ou encore de mauvaises interprétations de certains articles sur les collectivités territoriales. Des prises de bec à peine voilées entre SE et maires sont fréquentes au sein de plusieurs communes. Selon nos sources, même si personne n’ose pour le moment mettre publiquement l’accent sur la carence technique notée chez certains Secrétaires Exécutifs au sein des communes, si rien n’est fait pour corriger le tir, la piètre prestation des SE finira par saper les objectifs de la réforme structurelle du secteur de la décentralisation. Mais ça murmure dans les communes. Les maires et autres collaborateurs directs de ces SE concernés trouveront-ils le canal idéal qu’ils n’hésiteront pas à »vider leur ressenti ». À tout point de vue, des formations de mise à niveau s’imposent pour mieux outiller les SE afin d’éviter de plomber le développement des communes. Les 100 jours de ces nouveaux Secrétaires Exécutifs seront une occasion en or pour une évaluation sur tous les plans.
Brivaël Klokpê Sogbovi