Prisons et maisons d’arrêt au Bénin : Des milliers de personnes en détention, 3.000 seront graciés bientôt
Ils feront très prochainement leurs adieux aux geôliers des prisons et maisons d’arrêt. Certains prisonniers maintenus dans les chaînes de la détention vont bénéficier très bientôt de la clémence du Président de la République. Ils sont estimés à des milliers de personnes à séjourner dans les prisons et maisons d’arrêt censés accueillir seulement six mille (6.000) prisonniers. Il s’en suit donc un surpeuplement de la population carcérale au Bénin. Cette situation déplaît dans les allées du pouvoir de Cotonou qui envisage d’ores et déjà de mesures fortes pour sauter les verrous des prisons afin de libérer un nombre important de détenus. Nos sources sont formelles. Bientôt 3.000 prisonniers seront remis en liberté sous certaines conditions par le mécanisme de la grâce présidentielle. Ce samedi 21 octobre 2023, l’atelier sur les approches de collaboration des acteurs et modalités d’harmonisation et de traitement des actes judiciaires a permis d’oser la réflexion sur la situation des détenus au Bénin. Les statistiques en termes de capacité d’accueil (6.000 places) et du nombre de prisonniers ressorti lors de la communication du Directeur des affaires pénales et des grâces (Dapg) du Ministère de la Justice et de la législation, Séidou Boni Kpégounou ont été scrutées de près. La détention, c’est l’exception et la liberté la règle. Ce principe, les avocats et autres acteurs de la justice le rappellent régulièrement. Le Bénin qui s’est engagé à travers plusieurs mécanismes internationaux pour promouvoir les droits humains veut maintenir sa cote de bon élève. Désengorger les prisons et maisons d’arrêt procède d’une politique globale du gouvernement pour, à terme réduire le surpeuplement de la population carcérale. Si cette mesure d’une grâce présidentielle massive n’est pas encore officialisée, la décision et la volonté politique sont déjà exprimées. Selon nos sources, pour bénéficier de cette mesure de grâce, un critère fondamental doit être rempli par les prisonniers : avoir purgé la moitié de sa peine sans avoir exercé des voies de recours. Par exemple, si un prisonnier est condamné à dix (10) ans de prison, si ce dernier a déjà passé cinq (5) ans de prison sans avoir exercé de voies de recours, alors il est bien éligible à la grâce présidentielle. Nos sources informent aussi que les greffiers en chef ont été sollicités pour faire parvenir à la Direction des affaires pénales et de la grâce (Dapg) les décisions relatives à tous les détenus ayant purgé la moitié de leurs peines dans avoir exercé les voies de recours. La volonté politique étant affichée, nos sources renseignent que les greffiers en chef s’activent sans répit pour compiler les listes des détenus éligibles pour les transmettre au Dapg.
Un démenti qui échoue à démentir l’information d’une grâce massive
C’est une évidence que le Bénin ne veut plus d’un surpeuplement de la population carcérale. Périodiquement, des décrets de grâces sont pris souvent dans le cadre de la célébration de l’indépendance du pays. C’est connu. Le Président de la République qui jouit de cette prérogative exceptionnelle l’utilise pour remettre en liberté certains détenus sous des conditionnalités précises. En 2022, un cadre législatif spécial a été conçu pour des remises de peine pour des raisons sociales et humanitaires avec, à terme, une grâce définitive. Cette disposition est aussi connue des Béninois. En plus de ces deux mécanismes, des sources proches du pouvoir judiciaire confirment l’information selon laquelle, chaque trois (3) mois une politique de remises de peine aux prisonniers exemplaires est observée.
La lecture croisée de ces mesures permet de dire que le gouvernement béninois affiche clairement une volonté pour désengorger les prisons au Bénin. La grâce imminente qui devrait permettre la libération de 3.000 prisonniers s’inscrit dans la suite logique de cette volonté politique du gouvernement soucieux de désengorger les maisons d’arrêt et prisons. Le sujet de la grâce était donc bien au cœur des réflexions lors de l’atelier organisé ce samedi 21 octobre au ministère de la Justice. Alors que le quotidien Le Potentiel a annoncé l’imminence de cette grâce présidentielle pour les 3.000 prisonniers, un essai de démenti des services de communication du Ministère de la Justice a été relayé ces dernières heures sur certaines plateformes numériques. Si au fond, le communiqué n’est qu’un rappel des sujets à l’ordre du jour, une analyse sommaire d’une portion dudit communiqué confirme bel et bien que les débats en atelier n’ont pu occulter la question de la grâce présidentielle. «L’activité a porté entre autres sur la numérisation des décisions de justice pour en améliorer la conservation, la sécurisation des actes judiciaires, l’examen des dysfonctionnements qui ralentissent la mise en œuvre diligente des dispositions légales relatives aux aménagements de peines (libération conditionnelle, suspension des peines et grâce présidentielle) pour la recherche de solutions idoines», lit-on dans le communiqué publié par les services de communication du ministère de la Justice et de la législation. Le dernier point relatif à la mise en œuvre diligente des dispositions légales relatives aux aménagements de peines intègre parfaitement le mécanisme de la grâce présidentielle. Expressément et sans détour le même communiqué a mentionné ce mécanisme de la grâce présidentielle. Il ne devrait y avoir aucune susceptibilité sur le recours à la grâce présidentielle.
Aucun examen sérieux des dysfonctionnements qui ralentissent la mise en œuvre diligente des dispositions légales relatives aux aménagements de peines ne pouvait se faire sans ouvrir une fenêtre sur le mécanisme de la grâce présidentielle. Le communiqué de démenti a fini par confirmer implicitement l’information de première main donnée par notre rédaction quant aux 3.000 prisonniers en attente de bénéficier de la grâce présidentielle. Éduquer, sensibiliser et communiquer à profusion afin d’atteindre et maintenir un idéal rêvé de zéro déviance. C’est le vœu de tous les États du monde. Le Bénin est d’ailleurs sur cette voie. Il s’agit d’un vœu pour fermer les portes des prisons. Qu’un gouvernement envisage des mesures rationalisées pour désengorger les prisons et maisons d’arrêt à travers une grâce présidentielle, c’est tout à son honneur.
La vie en prison n’est facile pour aucun détenu même logé dans des conditions dites luxueuses. Les familles qui ont leurs enfants dans ces prisons et maisons d’arrêt seront sans doute contentes si cette grâce présidentielle est officialisée pour les 3.000 détenus au bout du processus en cours. L’État qui paye cher pour l’entretien des détenus pourra aussi se soulager. Trêve de polémiques, la grâce présidentielle est bel et bien l’un des mécanismes envisagés pour résorber le surpeuplement de la population carcérale.
Brivaël Klokpê Sogbovi