Critiques acerbes contre la réforme de la décentralisation : Les leçons de Eudoxie Dakpè au député LD Joël Godonou

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Conseillère technique à la décentralisation et au développement local du Président de l’Assemblée Nationale, Eudoxie Dakpè n’a pas perdu du temps avant de recadrer le député Joël Godonou, élu du parti de l’opposition Les Démocrates (LD). Dans une capsule vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, le député LD élu dans la 16e circonscription électorale a vertement critiqué la réforme du secteur de la décentralisation actée le 21 octobre 2021 à travers le code portant administration territoriale.

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Le député opposant parle d’une « recentralisation déguisée » , d’une réforme qui trahit  » l’esprit et l’espoir  » de la décentralisation, d’ une politisation des choix des cadres techniques et d’un transfert des compétences autrefois dévolues aux collectivités territoriales aux agences notamment dans le domaine de l’éducation et de l’assainissement du cadre de vie.

Si les positions défendues par l’élu du peuple emballent les uns et suscitent des questions chez les autres, elles ont poussé Eudoxie Dakpè à réagir.

La conseillère technique à la décentralisation et au développement local du Président de l’Assemblée Nationale a, dans un post, déconstruit les arguments avancés dans la capsule vidéo. L’experte qui se sent à l’aise dans son domaine a donné des leçons à l’élu. Le style en dit long .

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Mesdames et MessieursJe suis Eudoxie DAKPE Conseillère technique à la Décentralisation et au Développement local du Président de l’Assemblée nationale.

Je n’ai pas l’habitude d’intervenir sur les Réseaux Sociaux mais certaines affirmations de l’Honorable Godonou Joel, député du parti Les Démocrates, « élu dans la 16ème circonscription électorale » faisant l’état des lieux sur la Décentralisation dans un capsule conçu à dessein, m’amènent à rétablir les faits dans la juste réalité afin d’éclairer l’opinion, sans prisme déformant.

La Décentralisation comme on le sait, est un système administratif et politique permettant de faire participer les citoyens à la gestion des affaires locales. En jetant un regard rétrospectif sur le processus ayant conduit à l’adoption de la réforme de l’Administration Territoriale au Bénin, il est apparu que l’objectif final que vise le processus de la Décentralisation s’articule autour de deux points essentiels, que sont :

– la promotion de la Démocratie à la base et,- le Développement local.

Toutes actions et autres initiatives en matière de Décentralisation devraient normalement tendre vers la réalisation de ces deux objectifs.Le Bénin a amorcé son expérience de la Décentralisation depuis 2003 avec l’élection des premiers conseils communaux.

Cette expérience a fait son bout de chemin avec tout ce qu’on peut remarquer comme succès mais aussi défis non relevés, comme l’a signalé le rapport des évaluations d’étape.En termes de défis non relevés au bout de deux décennies, on peut évoquer :

– La politisation à outrance de l’administration communale ;- la faible capacité de mobilisation des recettes domestiques ;

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– l’Insuffisance des cadres techniques spécialisés pouvant être à la hauteur des ambitions locales ;

– la vétusté ou la quasi inexistence d’ infrastructures appropriées pour l’accomplissement des missions dévolues.

Et c’est compte tenu de ces insuffisances qu’une série d’actions correctrices a été amorcée depuis 2016 et notamment le vote d’un nouveau code portant administration territoriale le 21 Octobre 2021 qui consacre de nouveaux organes de gestion pour renforcer la gouvernance au niveau des collectivités. Il importe de rappeler ces constats basiques justifiant les actions actuelles. L’on ne saurait évoquer des conséquences sans s’en référer aux causes.

Partant, il est apparu nécessaire de procéder au recrutement des Secrétaires Exécutifs (SE) avec un bon niveau, et aujourd’hui ordonnateurs du budget des communes, pour relever le niveau de la Gouvernance, ainsi que des titulaires des autres fonctions. Il faut rappeler que les élus n’ont pas toujours le profil pour apprécier les procédures de passation des marchés publics ni la garantie d’une bonne exécution du budget (la loi n’ayant pas fait obligation d’un niveau d’instruction pour être élu).

L’environnement institutionnel étant assaini les problèmes de développement sont abordés aujourd’hui avec beaucoup plus d’efficacité, à ce sujet je ne saurais passer sous silence les problèmes de conflit que génèrent toutes réformes et qui se corrigent avec le temps.

En termes d’acquis, on note un accroissement substantiel de la mobilisation des ressources propres des communes courant 2022-2023, un acquis qui était un nœud gordien pour les collectivités vu que les conditions d’une bonne mobilisation n’étaient pas remplies.

L’accroissement des subventions de l’Etat à l’endroit des collectivités pour l’investissement à travers la contractualisation avec les agences nationales telles que La Société de gestion des déchets et de la salubrité du Grand Nokoué, l’Agence pour la Construction des Infrastructures dans le Secteur de l’Éducation (ACISE) et bien d’autres ne saurait être confondue à une quelconque forme de centralisation mais plutôt à une maitrise d’ouvrage déléguée où la mairie reste et demeure le maitre d’ouvrage. En effet, c’est pour des raisons d’efficacité et d’efficience que la mairie transfert ses pouvoirs aux agences dans la limite des conditions fixées par la loi.

Je Profite pour dire à l’Honorable Godonou que le Gouvernement n’est jamais intervenu dans la contractualisation entre les mairies et les agences nationales et ce mode de gestion répond parfaitement au principe de la libre administration des collectivités territoriales car les collectivités doivent s’administrer librement par les conseils élus.

Il n’a jamais été question de transferer les compétences des communes aux agences nationales.Enfin, pour ce qui concerne la désignation ou l’élection du maires et de ses adjoints, selon le code éléctoral de 2024, le maire et ses adjoints sont désignés par le parti ayant obtenu la majorité absolue des conseillers.

A défaut de majorité absolue, le maire et ses adjoints sont désignés par l’ensemble des partis ayant constitué une majorité absolue par la signature d’un accord de gouvernance communale. Ainsi, les partis politiques ont voulu prendre leurs responsabilités en accompagnant les élus communaux dans leur dynamique d’impulsion de développement local tout en empêchant au détour des destitutions, les guerres et les règlements de comptes politiciens.

Pour finir, me mettant au cœur de la relation entre l’Etat et les collectivités territoriales, je puis vous affirmer sans ambages que toute réforme engagée au nom de la Décentralisation qui n’a pas vocation à promouvoir le développement à la base n’est qu’un vain concept.

Et il n’existe pas un modèle type ou standard . Chaque pays fait son expérience et se réadapte avec le temps .Il serait regrettable de vouloir reculer et arrêter la dynamique en cours depuis 2016 en matière de décentralisation. Ce serait une négation de la marche vers un développement du potentiel socio économique résilient de nos collectivités locales.

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