Disparition d’un haut cadre du ministère des finances : »L’affaire Dangnivo », le cauchemar de Yayi, des dignitaires de son régime accablés
Pierre Urbain Dangnivo. Ce cadre du ministère de l’Economie et des Finances est porté disparu depuis une quinzaine d’années. À l’époque, Boni Yayi était au pouvoir. L’affaire faisant grand bruit, le siège présidentiel a même tremblé sous les grondements d’une rue devenue le lieu des marches de protestation de syndicalistes, leaders politiques, acteurs de la société civile, etc.
2010-2025. Quinze ans après la disparition de Pierre Urbain Dangnivo, la justice ne lâche pas l’affaire. Depuis le mardi 11 mars 2025, le Tribunal de première instance de Cotonou a rouvert le dossier. Et depuis 72h, que de révélations pleuvent lors des dépositions des agents de l’appareil sécuritaire au palais présidentiel à l’époque. Les propos des principaux accusés remettent au cœur de l’affaire des visages du pouvoir du changement. L’ancien Chef d’État est lui-même cité à plusieurs reprises. Des actes auraient été posés en son nom ou sa demande, si l’on s’en tient aux dépositions de certains hauts dignitaires du régime de l’époque. Vrai ou faux, seule la justice pourra le déterminer dans la suite de l’enquête.
Les experts légistes, résultats d’analyse médicale à l’appui, laissent croire que le corps exhumé à Womey près du domicile du présumé assassin Codjo Alofa, est bien celui de Pierre Urbain Dangnivo. Si l’hypothèse de la mort de Pierre Urbain Dangnivo se précise, ce sont les dépositions qui donnent des tournis. Les hauts responsables de l’appareil sécuritaire autour de l’ex-président seraient en possession du téléphone portable de Pierre Urbain Dangnivo.
Ces hauts responsables auraient payé les services de tiers pour simuler une découverte fortuite du téléphone qu’ils iraient ensuite déposer dans un média. L’ex-chef de la garde rapprochée de l’ex-président est nommément cité à cette phase des dépositions. Accusation qu’il rejette par ailleurs. Avant ces accusations graves, c’est l’un des principaux suspects, qui a désigné un ancien ministre de Boni Yayi comme celui qui venait le saluer en prison, lui remettant du numéraire puis lui activait des abonnements Canal+ mensuellement.

Les traitements de faveurs et des actes de générosité à l’égard des accusés jetés en prison seraient, selon les dépositions, ordonnés par »la haute autorité ». Sauf que et ancien ministre et ex-patron de l’appareil sécuritaire du palais n’arrivent pas mettre des noms sur des voix anonymes qui leur auraient donné des instructions au nom de Boni Yayi ou à confirmer ces accusations portées par les principaux accusés incarcérés. La brouille reste entière. Chacun voulant sauver sa tête. Les dépositions des accusés tendent aussi à faire croire qu’ils ont été instruits pour accuser injustement des innocents.
Fallait-il peut-être à tout prix trouver un coupable ou alors faire endosser le crime commis à d’autres ? Le temps actuel est celui de la justice, de la vérité et des sanctions à terme. Le temps actuel est celui d’une famille plongée dans l’angoisse depuis 15 ans à la recherche de leur fils sans savoir s’il est en vie ou mort.
Ce temps est, in fine, celui du deuil si l’assassinat de Pierre Urbain Dangnivo se confirmait comme le démontrent les indices et les conclusions des rapports d’expertise. Le procès est loin de livrer tous ses secrets.
Brivaël Klokpê Sogbovi