
Le fleuve Ouémé, sombre et impitoyable, livre peu à peu les corps qu’il avait engloutis. Ce mardi 19 Août 2025 encore, onze nouvelles dépouilles ont été arrachées à ses profondeurs, sous le regard impuissant des familles massées sur les berges, portant à trente huit le nombre de victimes confirmées depuis le drame.
Dans la nuit du dimanche 17 Août 2025, un autocar de la compagnie STM, immatriculé CC 0085 MD, en provenance de Lomé et à destination de Niamey, avait violemment heurté la rambarde du pont de Béthel avant de basculer dans les eaux noires du fleuve Ouémé. Le choc fut brutal, la chute inexorable. Très vite, le plan ORSEC fut déclenché sur instructions du chef de l’État, mobilisant plongeurs, forces de sécurité et protection civile. Mais malgré la célérité des secours, le fleuve s’était refermé sur ses victimes.
Lundi après-midi, lorsque la carcasse du bus fut enfin remontée à la surface, l’horreur se révéla vingt-trois corps sans vie, dont huit femmes et une adolescente, gisants dans les décombres métalliques. Ces découvertes s’ajoutaient aux dix personnes extraites du courant dès la nuit du drame neuf rescapés transportés à l’hôpital de Savè, aujourd’hui en état jugé stable, et une victime décédée sur place.
À ce stade, le bilan officiel fait état de cinquante-quatre passagers recensés, dont trente huit retrouvés : vingt-six morts avant ce mardi, auxquels s’ajoutent les onze dépouilles récupérées aujourd’hui, et neuf survivants. Il reste encore sept personnes portées disparues, que les plongeurs continuent de rechercher dans les eaux troubles et capricieuses de l’Ouémé.

Le ministre de l’Intérieur, accompagné du préfet des Collines et des autorités sanitaires, a suivi pas à pas les opérations de repêchage, apportant le témoignage de la solidarité nationale aux familles éplorées. Mais derrière les gestes officiels, une question lancinante demeure, combien d’autres vies le fleuve retiendra-t-il encore avant que le décompte ne s’achève ?
Sur les rives endeuillées, les visages se ferment, les larmes se taisent, remplacées par un silence lourd, seulement troublé par le clapotis du courant et les ordres brefs des secouristes. Dans cette atmosphère de deuil suspendu, le gouvernement appelle les transporteurs et conducteurs à une discipline stricte, afin que de telles tragédies ne se répètent plus sur les routes béninoises.
Mais pour l’heure, seule l’angoisse demeure. Sept âmes sont encore portées disparues. Et le fleuve, immense et implacable, garde ses secrets.
Joseph Sossou
