Système d’encadrement des missions officielles (SEMO): un marché de fraude s’anime dans les zones sanitaires
Dans le Bénin de la dématérialisation des services, le digital est au cœur du fonctionnement des administrations publiques. Mais au-delà du gain en termes de simplification dans la fourniture du service public, le gouvernement à travers la digitalisation entend lutter contre toutes les formes de fraudes jadis pratiquées dans les couloirs de l’administration. Pour rationaliser la mobilité des agents de l’État sur différents terrains, un Système d’Encadrement des Missions Officielles (SEMO) a été conçu.
Dans les cercles du pouvoir, le Semo est la solution numérique pour contraindre les candidats à la fraude d’abandonner leurs sales habitudes. Le Système d’Encadrement des Missions Officielles (SEMO) est l’interface permettant de procéder aisément aux vérifications d’usage sur la régularité des missions des cadres de l’administration publique. Il a été officiellement lancé le jeudi 29 avril 2021. Mais depuis son lancement, le Semo qui a fait des mécontents n’a pu échapper aux intentions malveillantes des fraudeurs. Évidemment, une plateforme de contrôle des départs en missions officielles qui est censée empêcher entre autres, des doublons de mission au cours d’une même période pour un même agent, ne peut que susciter des grincements de dents chez les habitués de la fraude. Ainsi, dans les couloirs de l’administration, la délinquance de certains cadres s’est éveillée pour contourner les radars du SEMO et ainsi continuer par jouir des gains indus liés aux missions fictives. Dans la nouvelle technique de contournement, certains agents de l’État réussissent à se retrouver en mission doublement et triplement au cours d’une même période comme s’ils avaient un don d’ubiquité. Selon nos sources, la fraude dans le circuit d’attribution des missions sur fond de contournement du SEMO est généralisée dans le secteur de la santé. Dans la plupart les 34 zones sanitaires que compte le Bénin, des agents se retrouvent simultanément sur des missions différentes dans une même période. Mais comment cela est-il possible ? Selon nos sources, le SEMO n’est pas systématiquement écarté dans l’attribution des missions. Seulement, la sale intelligence amène des agents à trafiquer le système. « Pendant que l’ordre de mission est établi sur la plateforme et imprimé, et la mission est en cours, les agents indélicats annulent l’ordre de mission sur la plateforme et établissent à nouveau un autre Ordre de mission au cours de la même période. Et ceci concerne nombreuses Zones sanitaires du Bénin », a expliqué une source approchée par notre équipe d’investigation. Dans les normes, un agent n’aurait droit qu’à une seule mission dans une période, ont relevé nos sources. Mais avec la technique qui consiste à annuler les ordres de mission sur la plateforme SEMO, on retrouve une seule personne sur deux voire trois différentes missions dans la même zone sanitaire du Bénin. Le phénomène est devenu la mode, s’exclame une source indignée de voir que certains agents font tout pour nuire aux actions d’assainissement des finances publiques entreprises par le gouvernement.
Les facettes de fraude, des pertes pour l’État, la main lourde de la justice attendue
Si le Système d’encadrements des missions officielles était le palliatif parfait pour conjuguer au passé la fraude, la technique d’annulation des ordres de mission alors que ces missions sont en cours crée des préjudices énormes. En effet, grâce à cette technique de fraude, ces agents indélicats qui excellent dans une délinquance luxueuse se font payer doublement et triplement des frais de mission. Ces frais de mission sont pris en charge par l’État, les régies financières des zones sanitaires ou par des partenaires extérieurs. Il s’agit donc des frais indus que ces cadres fraudeurs perçoivent en trafiquant des données sur la plateforme SEMO. Dans ces conditions, il est plus que nécessaire d’arrêter la saignée en dépêchant une mission de contrôle de la direction de service de l’informatique du ministère des Finances pour vérifier au plus près tout ce qui se fait dans la gestion des missions dans les zones sanitaires du Bénin. C’est ici, que la Justice béninoise et en l’occurrence la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET) devrait frapper fort. Une fois que ces agents indélicats seront identifiés, des procédures rigoureuses devraient être engagées assorties de lourdes sanctions. Au fond, la fraude est motivée par une gloutonnerie financière inexplicable de certains agents du secteur de la santé. On veut tout » bouffer » seul et tout bouffer partout. Tout pour moi et rien pour les autres. C’est la devise de ces stars de la délinquance administrative où tantôt ce sont des statisticiens qui sont à la manœuvre dans certaines zones sanitaires, et tantôt des cadres de profils variés qui sont à la manette dans d’autres zones sanitaires. La pénurie d’agents à positionner sur les missions est un argument qui ne tient pas la route au regard des données disponibles sur l’état du personnel. Aucun crime n’est parfait diront. Si la justice fouille, des traces de la fraude existent. Tenez! Selon certaines sources, certains agents ne sont pas informés de l’utilisation de leurs noms et références pour l’établissement de l’Ordre de Mission. « (…) c’est lors du paiement qu’on les invite pour émarger et le butin est partagé entre le cadre émetteur de l’ordre de mission et le nom de l’agent bénéficiaire », ont renseigné nos sources qui laissent entendre que cette technique de fraude coûte encore très cher à l’État dans les périodes de fin d’année qui coïncident avec les fêtes et où les agents indélicats aiguisent leur appétit et veulent consommer à tout prix le budget. Il s’agit-là d’un véritable réseau de gangs déguisés en agents vertueux au service de l’État opérant dans les zones sanitaires. La mission doit être diligentée pour vérification activité par activité et sans doute que les noms des agents qui se retrouvent sur deux voire trois missions au cours de la même période seront détectés. Quoi qu’il en soit, la fraude doit être combattue et ses auteurs devront être punis à leur hauteur de leur forfaiture. L’argent du contribuable ne saurait alimenter ce circuit noir de fausses missions ou de missions simultanées hors normes.
B. K. S