Irrégularités dans les marchés publics passés en 2020 : la prison, châtiment annoncé sur le crime des 130 milliards

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Sur la chaîne de la commande publique, les acteurs attendus pour remplir convenablement leur mission ne répondent pas toujours présents. Des imperfections, des actes assimilés à la fraude, des violations des textes de loi, des jeux de favoritisme, des omissions graves… Dans l’un ou l’autre des cas, l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) ne veut rien lâcher. L’audit indépendant réalisé sur les marchés publics au titre de l’année 2020 en République du Bénin vient attester de l’existence réelle de manquements sur la chaîne de la commande publique. C’est d’ailleurs à juste titre que l’Autorité de régulation des marchés publics, par décision n°2023-077bis du 15 juin 2023 a fait l’option de s’autosaisir des irrégularités constatées par l’audit indépendant dont le rapport validé a mis en cause trente-huit (38) autorités contractantes. Les manquements relevés au titre de 2020 dans le cadre de la passation des marchés publics portent sur des montants faramineux. Allant des centaines de mille francs CFA à des milliards de francs CFA, ces marchés souffrent de plusieurs biais, ce qui jette un discrédit sur les acteurs commis à la tâche. Plus de cent trente milliards (130 000 000 000) FCFA, c’est l’estimation des marchés publics passés avec des biais. Presque toutes les structures publiques dans différents secteurs sont touchées. Du sommet de l’État à travers les ministères jusqu’aux structures déconcentrées, les murs sont lézardés partout. Les auditeurs ont eu le temps de faire le constat et de mettre le doigt sur chacune des erreurs. Entre autres structures épinglées, la Haac, le ministère des Infrastructures, l’université de Parakou, le ministère des Enseignements maternel et primaire, le ministère du Cadre de vie et du Développement durable, l’agence pour la construction des infrastructures dans le secteur de l’éducation, les mairies de Cotonou, de Parakou, Lokossa, Dassa-Zoumè, Porto-Novo, Copargo, Banikoara, Tchaourou, Semé Podji, la SBEE, l’Agence nationale de promotion des patrimoines et de développement du tourisme, l’Agence béninoise d’électrification rurale et de maîtrise d’énergie, l’Agence de développement de Sèmè City, la Société de gestion des marchés autonomes, la Loterie nationale du Bénin, l’Agence territoriale de développement agricole Ouème, Atlantique, Littoral, Mono, le Centre hospitalier et universitaire de la mère et de l’enfant lagune de Cotonou, le ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de la Pêche, le Cnhu-Hkm, le Centre hospitalier universitaire départemental Borgou Alibori, le ministère de l’Eau et des Mines, le ministère de l’Énergie, le Fonds national de développement agricole, le ministère de la Santé, la Soneb, le ministère de l’Économie et des Finances, la mairie d’Akpro-Missérété, la Société nationale de mécanisation agricole, etc. Les fautes commises aussi sont aussi connues.
L’audit révèle, par endroit, une incomplétude dans la tenue et la conservation des documents relatifs aux transactions ; la non-élaboration des rapports d’activités par les Personnes responsables des marchés publics (Prmp) et Cellule de contrôle des Marchés publics (Ccmp), l’absence de preuve de publication du Procès-verbal d’ouverture de l’appel d’offres ; de l’existence d’incohérences dans la conduite de l’évaluation des offres ; la non-élaboration du PV d’attribution provisoire ; de l’absence de l’avis de la Ccmp ou de la Direction nationale du Contrôle des marchés publics (Dncmp) sur la proposition d’attribution provisoire ; la non-publication du PV d’attribution provisoire ; de l’absence de preuves de notification d’attribution provisoire au soumissionnaire retenu ; de l’absence de la preuve de notification des résultats d’attribution provisoire aux soumissionnaires non retenus ; de l’absence de preuve de production de garantie de bonne exécution par le titulaire du marché ; de l’absence de preuve de restitution des garanties de soumission aux soumissionnaires évincés ; des marchés non enregistrés ; des marchés en cours d’exécution avant l’enregistrement ; le non-respect du délai légal d’attente après la notification des résultats ; l’insuffisance des canaux de publication des Drp au niveau du siège des préfectures où mairie, chambres des métiers ; l’absence de preuve de constitution d’un répertoire de fournisseurs agréés ; une passation par procédure de DC de marché dont le montant prévisionnel hors taxe est supérieur au seuil dédié ; l’absence dans la documentation des rapports spéciaux justifiant le recours au gré à gré ; l’absence de preuve de communication pour l’information à l’Armp du marché passé par entente directe ; l’absence de preuves de consultation des entrepreneurs, prestataires ou fournisseurs au moins dans le cadre des seuils de dispense ; une présomption de pratiques de collusion entre soumissionnaires ; le fractionnement des marchés ; la non-application des différentes garanties prévues dans le marché notamment les garanties d’avance de démarrage, de bonne exécution et/ou retenue de garantie ; le non-prélèvement des pénalités de retard d’exécution ; des difficultés d’exécution ; la non-utilisation des équipements ; qualité douteuse des travaux ; des marchés en difficulté ou abandonnés, etc.
Les marchés en jeu sont importants. Les montants affectés sur chacun de ces projets sont de l’ordre du milliard de FCFA. Et face aux manquements relevés, il apparaît sans doute que les autorités contractantes en l’occurrence les acteurs de la chaîne de commande publique ont rempli leur tâche avec beaucoup de légèreté. Ce faisant, ils ont engagé les fonds du contribuable dans des aventures sombres et sans assurance. La preuve, le rapport indique des retards dans l’exécution ou des marchés mal exécutés. Rien n’exclut que ces erreurs aient été commises sciemment juste pour alimenter des réseaux de coquin et coquine autour des milliards de FCFA affectés sur les marchés publics. Pour cette raison, la Brigade économique et financière devra s’autosaisir du dossier en tant que bras opérationnel de la justice pour tirer cette affaire au clair avec une enquête en bonne et due forme. Et selon le degré des responsabilités, les auteurs devront être traduits devant les cours et tribunaux pour répondre de leurs actes. L’argent du contribuable n’est pas un patrimoine privé pour qu’on en fasse un usage sur-mesure des poches personnelles d’un groupe restreint.

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