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Proposition de loi portant modification de la Constitution au Bénin : Plus de blocage, des Démocrates en soutien à la révision au Parlement

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La Constitution béninoise sera-t-elle à nouveau révisée ? L’idée agite les débats depuis le vendredi 31 octobre 2025, jour d’ouverture des travaux de la deuxième session ordinaire à l’assemblée nationale à Porto-Novo. À la base de ce nouveau débat ouvert, les députés Aké Natondé et Assan Seibou, respectivement président des groupes parlementaires Union Progressiste Le Renouveau (Up-r) et Bloc Républicain (Br). La nouvelle a pris tout le monde de court. En cette matinée du vendredi, les deux élus ont transmis au président de l’Assemblée nationale, une proposition de loi portant révision de la Constitution. Les porteurs de la proposition n’ont pas tari d’arguments pour justifier leur démarche. Dans l’exposé des motifs, ils procèdent à un diagnostic de la démocratie telle que pensée en 1990 et relèvent des « dysfonctionnements institutionnels et systémiques observés après une trentaine d’années de mise en œuvre ». En dépit des premières réformes opérées à la faveur de la révision constitutionnelle de 2019, les députés Aké Natondé et Assan Seibou pensent qu’il y a encore des efforts à faire. En l’état, les réformes déjà opérées « ne suffisent pas à rendre irréversible l’élan du développement complet et durable pris par le peuple béninois », écrivent-il dans l’exposé des motifs. Pour le duo de député, il est constant que l’accélération voire l’accentuation de la transformation structurelle du Bénin ainsi que le règlement durable des problèmes socio-économiques sont annihilés avec l’animation de la vie politique dans une perspective politicienne qui oppose systématiquement les courants politiques adverses et empêche tout éventuel compromis susceptible de permettre la mise en œuvre de solutions consensuelles aux problèmes de développement de la Nation. Pour y remédier, soutiennent-ils, il convient d’envisager la création d’un nouvel organe dans l’environnement institutionnel, capable de rapprocher voire arbitrer les options politiques divergentes, au profit de l’action publique efficace et consensuelle. « Il est souhaitable que cet organe nouveau compte, entre autres, sur l’expérience des anciens présidents de la République, des anciens présidents de l’Assemblée nationale ainsi que des anciens présidents de la Cour constitutionnelle pour leur confier, à titre principal, cette mission : c’est la raison qui motive la proposition de création du Sénat », lit-on dans l’exposé des motifs. Ainsi, le Sénat aura pour rôle de : concourir à garantir la sauvegarde et le renforcement des acquis du développement de la Nation, de défense du territoire et de sécurité publique. A ce titre, il veille à la stabilité politique, la continuité de l’État, au débat politique contradictoire constructif.
assurer la promotion des mœurs politiques conformes à la sauvegarde des intérêts supérieurs de la Nation, de l’Unité et de la Cohésion nationale, du développement durable et de la paix sociale, veiller à renforcer les libertés publiques, la qualité de la gestion des biens publics, l’unité et la concorde nationales en vue du développement humain équilibré et durable. De même, en matière législative, le Sénat délibère, a priori, sur tout projet ou proposition de loi à caractère politique, notamment en ce qui concerne la dévolution ou l’organisation du pouvoir d’État. Par ailleurs, le Sénat peut solliciter une seconde lecture de toute loi votée à l’Assemblée nationale exceptées les lois de finances et assimilées.
A cet effet, lorsque, à sa demande de seconde lecture de toute loi conférée par la Constitution, l’Assemblée nationale écarte les observations du Président de la république, le Sénat est saisi en lecture définitive.
Par ailleurs, il est indiqué que pour tenir compte des exigences d’une telle chambre politique d’une part, et des expériences requises dans la gestion des dossiers d’Etat d’autre part, le Sénat soit composé des anciens présidents de la République ; des anciens présidents de l’Assemblée nationale ; des anciens présidents de la Cour constitutionnelle ; des chefs d’État-major des forces en charge de la défense et de la sécurité nationales (tous membres de droit). Il est également souhaité qu’en dehors des membres es-qualités mentionnés, le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale désignent chacun, des membres dont le nombre constitue un quota qui n’excéderait pas au total, 1/5 de ces membres de droit.

*Une révision constitutionnelle en roue libre*

La proposition de loi portant révision constitutionnelle a été transmise au président de l’Assemblée nationale dans la matinée du 31 octobre 2025. Celui-ci l’a aussitôt transmise à la commission des lois pour étude en vue de son adoption ultérieure pendant la session en cours. Question, les éléments de motivation exposés par les deux députés suffiront-ils à faire passer la nouvelle loi ? Rien n’était gagné d’avance. Tant l’opposition parlementaire incarnée par le parti les Démocrates, avec ses 28 députés, étaient en position de faire entrave à cette proposition de loi portant révision constitutionnelle. Comme en 2024, cette minorité de blocage devrait être redoutée. Mais, ce n’est plus le cas. Le parti LD traverse une crise sans précédent depuis quelques semaines. Six (6) députés sur les 28 que compte le parti ont démissionné du groupe parlementaire. Notification en a été faite au Président de l’Assemblée nationale le 31 octobre 2025. Désormais non inscrits au parlement, ces députés démissionnaires pourraient facilement s’allier aux 81 députés de la mouvance. Dès lors, les ⅗ et ⅘ d’élus nécessaire pour la recevabilité et l’approbation de la proposition de loi portant révision de la Constitution seront désormais à portée de main. Le parti Les Démocrates s’est désolidarisé de tout projet de révision constitutionnelle. Mais le parti n’a plus le contrôle sur les députés démissionnaires. Un tel contexte arithmétique qui rebat les cartes et modifie la configuration des forces au parlement présage d’une révision assez facile à consommer. Avant la fin de cette deuxième session donc, sauf revirement spectaculaire de situation, la Constitution sera révisée et le sénat, nouvel organe pensé pour corriger les tares de la démocratie et préserver les acquis de développement sera créé.

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*Des détails sur l’identité des membres de droit du Sénat*

Le Sénat sera composé des anciens présidents de la république ; des anciens présidents de l’assemblée nationale ; des anciens présidents de la Cour constitutionnelle ; des chefs d’État-major des forces en charge de la défense et de la sécurité nationales (tous membres de droit). Il est également souhaité qu’en dehors des membres es-qualités mentionnés, le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale désignent chacun, des membres dont le nombre constitue un quota qui n’excéderait pas au total, 1/5 de ces membres de droit. S’il est difficile en l’état d’avoir des informations sur les membres du Sénat qui seront désignés par le Président de la République et par le Président de l’Assemblée nationale, un tour rapide dans le passé et une lecture du présent permet de lister les noms et prénoms des membres de droit du Sénat. Au titre des anciens chefs d’États, président de la République, trois (3) personnes siégeront au Sénat. Il s’agit de Nicephore Dieudonné Soglo (1991-1996), de Thomas Boni Yayi (2006-2016) et Patrice Athanase Guillaume Talon (2016-2026 en instance). Au titre des anciens présidents de l’Assemblée nationale, cinq (5) personnes siégeront au Sénat. Il s’agit de Houngbedji Adrien (1991-1995; 1999-2003 et 2015-2019); de Amoussou Bruno (1995-1999); de
Kolawole Idji Antoine (2003-2007) ; de
Nago Koffi Mathurin (2007-2015) et de Louis Vlavonou (2019-2023, 2023-2026 en instance). Au titre des anciens présidents de la Cour Constitutionnelle, cinq (5) personnes siégeront au Sénat. Il s’agit de Élisabeth Pognon, de Robert Dossou, de Théodore Holo, de Joseph Djogbenou et de Amouda Issifou. A eux s’ajouteront les différents chefs d’état-major en fonction (marine nationale, armée de l’air, armée de terre, garde nationale, état-major général et éventuellement police républicaine).

Si l’institution en vient à être fonctionnelle, le président de la République et le président de l’Assemblée nationale pourront désigner chacun les ⅕ des membres pour que l’effectif soit au complet. Mais en attendant, la proposition de loi devra passer par la case recevabilité, adoption et promulgation. Trois étapes qui semblent être déjà acquises en raison de la reconfiguration politique au parlement en faveur de la mouvance. À suivre.

B. K. S

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