Cour Africaine des Droits de l’Homme et du Peuple : les propositions du Bénin pour redorer le blason de l’institution
Une délégation de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples conduite par sa Présidente, Madame Imani Daud Aboud était hier jeudi 21 octobre 2021 dans les locaux du Ministère des affaires étrangères et de la coopération (MAEC) pour une séance de travail avec le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice et de la Législation, Sévérin Quenum. Au cœur des échanges, les questions de résistance et de retrait de certains États membres.
Il faut rappeler que ladite séance de travail résulte d’un certain nombre de constats. Il s’agit entre autres, du faible taux de ratification du Protocole relatif au Statut de la Cour Africaine des Droits et des Peuples ; le faible nombre de Déclarations de compétence déposées et enfin le non-respect des décisions de la Cour. Aussi il convient de rappeler que depuis quelques années, la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples est l’objet de réticence et de résistance de la part de certains États membres, y compris des États membres. Cette résistance s’est manifestée de plusieurs manières, notamment le non-respect des décisions de la Cour et un faible engouement à accepter les demandes de missions de sensibilisation de la Cour. Le cas palpable de cette résistance remonte en 2016 et 2020, lorsque quatre des dix États qui avaient pourtant reconnu la compétence de la Cour pour connaître des affaires émanant directement d’individus et d’ONG, ont retiré leurs Déclarations prévue à l’article 34(6) du Protocole de la Cour. Pour la délégation de la Cour ces retraits successifs peuvent être considérés comme un recul dans la construction de l’État de droit et la protection des droits de l’Homme. Ainsi donc, pour améliorer ses relations avec les Etats membres, la Cour a décidé de renforcer sa visibilité et sa légitimité. Il s’agira en effet, de sensibiliser les États membres sur le travail de la Cour, instaurer un climat de confiance et de coopération entre la Cour et ses États et d’établir un cadre de collaboration permanente pour impulser les réformes nécessitées par un bon fonctionnement de la Cour. Le ministre Séverin Quenum a saisi l’occasion pour expliquer à ses hôtes les raisons qui pourraient justifier les difficultés que rencontrent la Cour Africaine des Droits de l’Homme. Selon le Garde des Sceaux, il s’agit d’un problème lié au mode opératoire de l’institution qui viole plusieurs règles élémentaires à savoir : le principe de non épuisement des recours internes, le principe de la séparation des pouvoirs, le principe de la souveraineté des États, le principe de la sécurité juridique et financière des Etats et la violation des textes de l’Union par la modification unilatérale par la Cour des articles 80 et 81 de son règlement intérieur pour s’arroger les pouvoirs de Juge de l’exécution et d’agent d’exécution en lieu et place du Conseil Exécutif et de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine. Pour le ministre Garde des Sceaux il n’est pas étonnant que les décisions de la Cour soient bafouées. Pire, fait-il savoir, la Cour compromet, par ses condamnations pécuniaires astronomiques, l’existence ou à tout le moins, le développement des jeunes Etats africains aux économies très fragiles. Pour finir, le ministre Sévérin Quenum a annoncé que le Bénin, en tant que pionnier des droits de l’homme en Afrique, entend pleinement jouer sa partition dans la nécessaire réforme de la Cour. Dans ce cadre, le Gouvernement béninois a d’ores et déjà saisi la Commission de l’Union Africaine de propositions concrètes destinées à redorer le blason de ladite Cour pour une meilleure protection des droits de l’Homme.
A.A.T