Épidémie de putsch en Afrique de l’Ouest : Gilles GOHY décèle l’effet toxique d’un coup d’État

0 133
Banniere GKS

L’Afrique de l’Ouest n’est plus seulement attaquée par le virus de corona. Cette partie du continent noir sombre dangereusement en raison d’une seconde crise aussi pernicieuse que celle de la covid-19. Il s’agit en effet de l’instabilité politique, le Bitrex (produit très amer) des coups d’État militaires qui méritent l’attention, une sérieuse et technique analyse utile pour la restauration d’un paysage politique porteur de la paix et du développement dans les pays Ouest-africains concernés.

- Advertisement -

Pour ce faire, l’équipe de votre web média a accordé une interview à un émérite Universitaire béninois dont les expertises politique, sociologique et anthropologique sont non négligeables dans le diagnostic et la résolution des maux qui retardent la métamorphose génératrice du développement de l’Afrique. Il a pour nom Gilles Expédit GOHY, Professeur ; Sociologue ; Statisticien ; Démographe, Politologue ; Spécialiste en perspective, genre et développement, gouvernance et démocratie ; Maître de Conférences en sociologie du développement.

Le Potentiel : Professeur, comment vous apercevez les coups d’État militaires orchestrés au Mali, en Guinée et au Burkina Faso ?

Professeur : Les coups d’État militaires en Afrique, après leur rétention temporaire dans des casernes sécurisées contre le trouble toujours latent, refont continûment surface, comme des démons capricieux, des âmes damnées malveillantes, des caniveaux outranciers. Aiguillonnés par des forces perfides en mal de colonisation, de recolonisation ou de prédation, de jeunes officiers supérieurs ambitieux ou trop pressés d’exercer le pouvoir d’État, trouvent dans les putschs, la voie facile de réalisation de soi. C’est simplement une déception ! Vieil élément rajeunissant (ou rajeuni) mais resurgi du passé récent pour le grand malheur de la stabilité pour le développement des pays africains, un coup d’État militaire est une gangrène qui doit être vigoureusement vilipendée : quiconque n’est pas morbide ou mentalement dérangé ne peut effectivement pas l’encourager ! Les coups d’État en Afrique noire francophone avaient certes joué le rôle d’élément dynamique de catalyseur d’avenir, de facteur de changement social (passage d’un ordre socioéconomique à un ordre sociopolitique supposé meilleur). Aux lendemains des Indépendances en 1960, ce fut le cas

  • au Dahomey (actuel Bénin avec le précurseur de ses coups d’État militaire, le général Christophe Soglo et le dernier militaire Président de la République : Mathieu Kérékou);
  • au Togo (avec l’assassinat brutal du Président en exercice Sylvanius Olympio et l’installation cavalière au pouvoir de la dynastie Gnassingbé Eyadéma);
  • au Ghana (notamment le coup d’État militaire du capitaine Jerry Rawlings qui, à la faveur de la salubrité nécessaire, mit le Ghana sur l’orbite de son développement actuel tant envié);
  • la situation était identique dans les pays comme le Niger, le Nigeria, le Burkina Faso, le Tchad…

Le Potentiel : Certains observateurs les perçoivent facilement comme un outil de récupération néocoloniale, la revanche d’un verrouillage politique précédemment râté, la quête d’un asservissement permanent et irréversible. Que est votre appréciation de ces points de vue ?

Professeur : Ces observateurs y voient effectivement, à tort ou à raison, le bras outillé de l’ancienne puissance colonisatrice pour faire main basse définitivement sur les immenses richesses minières des pays concernés (le cas du Mali, récemment !). Mais, d’autres voient dans le même temps cette main pernicieuse en action pour le retour de leurs hommes de main autrement appelés « valets de l’impérialisme » ou suppôts installés de l’ancien colonisateur (supputations récentes sur le coup d’État au Burkina Faso où certains voient à terme, le retour fanfaronnant de son ancien Président Blaise Compaoré supposé bien aimé des terroristes/djihadistes). L’expression « chiens couchant ou accouchant de l’impérialisme » inventé au Bénin à la fin des années 1970 demeure totalement valable et parfaitement séduisante ici.

Le Potentiel : Un coup d’État militaire ovationné par le peuple a-t-il d’inconvénient ?

Professeur : Cher Journaliste, pour l’intérêt supérieur d’une Patrie, un coup d’État ne doit pas être ovationné. On devrait privilégier le dialogue. La préoccupation majeure que je tiens aussi à marteler est le caractère toxique d’un coup d’État militaire qui ramène malheureusement tout compteur à zéro et met désormais à mal des pouvoirs d’État constitutionnellement établis. La similitude dans tous les cas de coups d’État militaires actuels est que ce sont de jeunes officiers hyper formés et super entraînés par des pouvoirs d’État qu’ils trahissent ensuite crânement et déstabilisent prestement, dans une ingratitude honteusement assumée. Les exemples qui foisonnent désormais en Afrique noire francophone pullulent suffisamment fort pour qu’on s’y étende encore outre-mesure ici.

Le Potentiel : Quels sont les facteurs qui conduisent à un putsch ?

Professeur : Le coup d’État militaire ne réussit que là où les conditions objectives de sa réalisation sont réunies, notamment :

Banniere carrée
  • un dispositif sécuritaire faible ou inefficace qui fait le nid aux trahisons dont se nourrit le terrorisme;
  • des mécontentements fondés et de base tangible ;
  • des richesses minières évidentes, source de convoitises et de trahisons diverses.

J’insiste ici sur la trahison. Fille de l’ingratitude qui en a fait le lit, la trahison est la renonciation de la parole chère, la manifestation tangible de la déloyauté comme mode de vie et principe cardinal de transactions sociales. L’ingratitude est donc une vilénie héritée du passé. Dans sa forme dégénérée, elle prépare le lit aux élans sorcelleresques : l’ingrat est un sorcier potentiel et l’ingrate, une sorcière garantie, une mangeuse d’âmes irréversible, sorte de mante religieuse noire tueuse de maris et mangeuse d’enfants. L’ingrat (e) est pendable, tout court ! Corollaire de plus en plus banale, la trahison se développe malheureusement partout ! Les lieux d’apprentissage, de savoirs et de savoir-faire ne sont même pas épargnés, alors qu’ils le devraient. À défaut de ça, résolue, la gangrène évolue, perfide ! Le malaise devient alors évident quand les jeunes générations l’internalisent comme fait et élément de vie.

Le Potentiel : Est-ce à dire que la trahison est la source des coups d’État survenus ?

Professeur : Quand on analyse finement les récents coups d’État militaires en Afrique, noire francophone, on note aisément qu’ils y sont fortement corrélés à la proximité et à la confiance trahie. Un jeune officier supérieur bien formé pour son pays et installé ensuite à un lieu stratégique du pouvoir d’État pour le servir le trahira pourtant au profit de l’ambition favorable aux puissances étrangères en mal de reconquête colonialiste. Le puîné descend ainsi crânement l’aîné et lui prend le pouvoir d’État, grâce à une junte militaire avide de pouvoir d’État. « Ôte-toi que je m’y mette ! Je suis pressé par mes patrons ! », pourrait-on caricaturer !

Le Potentiel : Quel vaccin anti-putsch proposez-vous pour faire barrière à la propagation de l’épidémie de coup d’État ?

Professeur : Il est nécessaire pour un pays hautement jalousé comme mon pays, le Bénin, de se doter d’une garde prétorienne puissante, hyper formée à la sécurité institutionnelle (présidentielle) et à la défense dissuasive. Sans craindre les critiques paranoïaques que la mise en œuvre de ce corps d’élite ne manquera de susciter, je demeure convaincu que les responsables de mon cher pays veilleront au strict choix des éléments de cette garde prétorienne. En effet, en matière de fléchissement de la volonté pour la faute, chacun a son prix ! Il est donc évident que, seront systématiquement exclus de cette garde, tous ceux qui, de près ou de loin, auront un penchant prononcé pour l’argent et le gain facile car ce sont des traîtres potentiels. On bannira aussi ceux-là qui ont ou nourrissent un quelconque intérêt (ou espoir) à l’exercice du Pouvoir d’État : jeunes ambitieux, cupides de tous acabits, endettés et sournois, politiciens corrompus ou véreux, …bref, tous les mauvais éléments, d’office peu recommandables. La garde prétorienne dont il s’agit ici n’est pas un ramassis de barbouzes, mercenaires ou parias à leurs pays, mais, plutôt d’intègres prestataires de services dont seul le Président de la République (Institution) déterminera des modalités opérationnelles de recrutement et de travail. Cette garde prétorienne qui n’exclut pas la traditionnelle, est juste le corps d’élite du Président qui y loge ses éléments de confiance éprouvés et exemptés de tout germe de trahisons ou de tout penchant à la traîtrise !

Le Potentiel : Qui peuvent constituer cette garde prétorienne ? Qui peuvent en être membres ?

Professeur : Les éléments doivent avoir une caractéristique fondamentale : ils doivent avoir strictement peur de la honte (comme moi !) et nourrir résolument la honte de la honte comme la motivation essentielle de toute action sociale ! Ils seront pourtant constamment surveillés par un mécanisme interne d’anticipation de la pollution mentale source des trahisons diverses ou des fourberies préjudiciables aux atteintes des objectifs de l’Institution (Président de la République). En effet, quand les surveillants se sentent constamment surveillés, la tentation à la faute ou à la fraude s’effiloche et disparaît totalement. Œil de Caën pérenne, ce dispositif de prévention de fourberies est la vigie stratégique permanente et est d’emblée la garantie de sécurité au travail du Président de la République du Bénin qui a besoin de toute la quiétude nécessaire pour continuer de développer le pays. L’optimisme pérenne dans la Gouvernance dont le Président béninois, Patrice TALON a constamment besoin pour continuer de réussir brillamment sera d’office envisageable !

Le Potentiel : Votre mot de fin, Professeur !

Professeur : Je remercie vivement votre journal qui fait toujours de l’excellent travail de m’avoir permis d’y contribuer. Que les anciennes puissances colonisatrices laissent les pays africains décider tranquillement de leur avenir et de celui de leurs nombreuses richesses minières. Les incitations aux coups d’État militaires pourront alors s’effilocher et disparaître totalement pour le bien des communautés et des peuples africains. Merci encore et à bientôt !

Réalisée par Gaëtan DANHA

SWEDD

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

error: Content is protected !!