Implications d’une révision du code électoral : Mouvance : l’infidélité politique pour bloquer la révision constitutionnelle

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Les sages de Cour Constitutionnelle ont donné le ton à travers la décision Dcc 001-24 du 4 janvier 2024. Une injonction à peine voilée faite aux députés de la 9e législature pour amorcer une révision du Code électoral afin de rétablir un principe d’égalité entre les élus, notamment les maires habilités à parrainer les candidats à l’élection présidentielle de 2026. Sur le fond du débat, le calendrier électoral et les dates qui se chevauchent étaient un casse-tête chinois.

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Les idées convergentes reconnaissent l’existence de cette malfaçon normative héritée de la 8e législature. Le Chef de l’État, Patrice Talon a entrepris une consultation avec les groupes parlementaires. Tour à tour, il a reçu les députés des partis LD, Up-r et Br le lundi 22 janvier 2024. L’idée est de trouver un consensus pour extirper les points noirs du Code électoral qui pourraient conduire vers l’impasse électorale en 2026. Patrice Talon a affirmé sa position sur la légitimité des élus qui devraient parrainer les candidats à l’élection présidentielle de 2026.

Pour lui, ce sont les élus de 2026 qui sont légitimes pour parrainer. Si au sein des deux groupes parlementaires de la mouvance à savoir l’Up-r et le Br, cette position du Chef de l’État est reprise en chœur, rien n’est gagné d’avance chez les députés du parti d’opposition Les Démocrates. Le parti est d’ailleurs ressorti de la séance d’échanges avec le Président de la République avec la promesse de réfléchir posément sur le sujet avant de livrer sa position.

Avec Boni Yayi à la tête du parti Les Démocrates, des points de divergences ne tarderont pas à ressortir. Mais déjà, dans l’opinion publique, émerge assez rapidement l’idée qu’il ne serait pas possible de retoucher le Code électoral pour harmoniser les dates d’organisation des élections sans réviser à nouveau la Constitution.

À l’avant-garde de ce discours révisionniste, les députés de la mouvance donnent de la voix. Via des médias, ils rassurent que le Chef de l’État n’est nullement motivé par une révision de la constitution pour s’offrir un 3e mandat. L’opposition vent debout ne cesse de rappeler la responsabilité absolue de la mouvance dans l’adoption d’un Code électoral émaillé de lacunes en 2019. Par ailleurs, l’opposition affiche une aversion pour une nouvelle révision de la Constitution pour quelque raison que ce soit.

Révision constitutionnelle, vers un échec

Faisant corps aux discours déjà tenus après la rencontre avec le Chef de l’État, les députés pro-mouvance ont déposé sur la table du président de l’Assemblée Nationale, le vendredi 26 janvier 2024, une proposition de loi portant révision de la constitution. La proposition de loi (à lire en intégralité en fin d’article) est signée par le député du parti Bloc républicain, Assan Seibou. La version de cette loi disponible et partagée sur la toile permet de se rendre compte que les initiateurs de cette révision constitutionnelle veulent inverser l’ordre d’organisation des élections en 2026.

Désormais, l’élection présidentielle devrait être organisée avant l’organisation couplée des élections législatives et communales. D’autres articles de la constitution sont aussi visés dans la proposition de loi avec des modifications considérables. Par ailleurs, des sources anonymes proches du pouvoir annoncent que la révision devrait conduire à sauter la limitation des âges (40 ans pour la borne inférieure et 70 ans pour la borne supérieure) comme prescrit dans la constitution en vigueur.

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Même si pour l’heure, rien n’est sûr, il faudra y porter une attention particulière. Mais, du Code électoral à la révision de la constitution, les dés ne sont pas totalement jetés.

Le Président de la République, Patrice Talon qui, a priori, pourrait compter sur sa majorité parlementaire de 81 députés sur les 109 que compte l’Assemblée nationale, doit aussi se préparer à des surprises. En fin de mandat, le Président Patrice Talon ne peut plus forcément avoir la même emprise sur certains élus qui le soutiennent.

La révision de la Constitution n’est pas une affaire de vote à la majorité simple. Il faudra avoir les ¾ pour la recevabilité pour examen, puis les ⅘ de voix pour l’adoption d’un projet ou d’une proposition de révision de la constitution. Au regard de la configuration politique de l’assemblée, même si tous les 81 députés de la mouvance votaient pour une révision, il faudra encore avoir au moins 7 voix dans le rang des 28 députés du parti d’opposition Les Démocrates.

Et si par extraordinaire, les 7 voix sont obtenues, il n’est pas sûr que l’unanimité soit trouvée au sein de la mouvance autour d’une révision. L’infidélité politique est un virus qui n’a jamais quitté le corps des acteurs politiques. Beaucoup de députés mouvanciers attendaient le retour au parlement de l’opposition pour renouer avec ce jeu d’infidélité politique.

Il s’agit en réalité d’une trahison en secret au sein de son camp dans l’expression des votes en faveur ou à l’encontre d’une loi. Toute tentative de révision de la Constitution dans le contexte actuel court le risque de buter contre ce mur d’infidélité politique surtout au sein de la majorité parlementaire. Déjà, les menaces du Chef de l’État quant aux soutiens de la candidature de Olivier Boko sont prises avec légèreté par certains députés qui s’en fichent. Il s’agit-là des prémices d’une rébellion politique interne qui s’annonce en douce en cette fin du second mandat du Président Patrice Talon.

Le vote secret serait le choix idéal pour dresser le lit à l’infidélité politique devant conduire à l’échec d’une révision de la constitution. Au-delà d’un mécontentement politique, les arguments juridiques évoqués par certains spécialistes vont peut-être conforter le vote négatif des députés de tous bords. La Cour constitutionnelle ne serait pas fondée à donner des injonctions à l’Assemblée nationale pour revoir une loi qu’elle avait au préalable validée lors de son contrôle de constitutionnalité. Il s’agirait d’une  »intrusion maladroite dans la procédure législative » au Bénin, selon certains juristes.

Avec cette injonction, la Cour constitutionnelle risque de faire tomber inutilement son autorité si les députés font entrave à toute révision de la constitution. La norme voudrait alors que ce soit le code électoral qui soit révisé pour s’adapter à la constitution et non l’inverse. L’impasse est là et les députés qui ont le pouvoir de légiférer ont les clés en main. Le Code électoral, lui, sera facilement révisé. Mais la révision de la constitution, elle, risque d’échouer.

Patrice Talon devra compter avec l’infidélité politique de ses soutiens mécontents et la fronde des juristes qui influencent l’avis des parlementaires. In fine, la révision de la constitution se retrouve sur un boulevard plein d’épines et d’obstacles. La fin de mandat de Patrice Talon ouvre une nouvelle dynamique. Mais jusqu’où ? Wait and see.

Brivaël Klokpê Sogbovi

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