Pléthore de félicitations après la nomination de Tchomogo à Niort: Un non-lieu qui masque la valeur réelle de l’homme
L’ancien capitaine des Écureuils, Oumar Tchomogo s’est vu confier les U17 de Niort après avoir été sélectionneur des Écureuils plus de deux ans durant. Les différentes réactions sur les réseaux sociaux et dans les médias traditionnels ont suscité des investigations dont les résultats seront livrés à doses homéopathiques. Le premier, porte sur sa carrière professionnelle respectable, son bilan à la tête des Écureuils ponctué par quelques points positifs mais également de nombreuses zones d’ombres, objet de beaucoup de questionnements.
Le public sportif béninois peut se réjouir de voir Oumar Tchomogo désormais aux commandes des U17 à Niort. A priori, il s’agit d’une bonne nouvelle.
Du joueur professionnel…
De Cotonou à Guingamp, Valence, Amiens sans oublier Victoria Setubal au Portugal…, le natif de Natitingou aura été une valeur sûre et incontestable du football béninois avec deux CAN (2004-2008) à son actif en tant que joueur. Après de bons et loyaux services rendus à la nation en tant que joueur professionnel et capitaine des Écureuils, Oumar Tchomogo se trace un chemin après sa retraite. Il est toujours resté au contact des pelouses. Après avoir été adjoint dans l’encadrement technique des Écureuils, il fut titularisé en juin 2015.
… au sélectionneur national
En dehors de quelques victoires poussives et quelques nouveaux joueurs lancés, en deux ans quatre mois, il n’a pas su combler les attentes après 22 rencontres officielles toutes compétitions confondues (amicales + qualifications) avec les A’ et l’équipe fanion (8 victoires, 7 nuls et 7 défaites). Sous son règne, le Bénin a surtout manqué la CAN 2017. Les Écureuils étaient pourtant tout proche car, face au Mali en septembre 2016 lors du dernier match des éliminatoires, un nul ou au pire des cas, une défaite avec un but d’écart suffisait. Malheureusement, les Écureuils se sont effondré 5 buts contre 2 face à une équipe B malienne largement prenable.
Concrètement, en deux ans et quatre mois, le Bénin n’a jamais eu une identité de jeu. Les choix d’hommes et les options tactiques étaient incompréhensibles. Sur les 22 rencontres, l’équipe a encaissé 28 buts, ce qui illustre clairement un problème défensif non solutionné alors que des valeurs sûres pour faire le job étaient en activité et en forme dans leurs clubs respectifs mais purement et simplement écartés. Idem en attaque.
Une légèreté sur fond de copinage
Avec un peu de recul, on peut chercher à comprendre ce qui s’était réellement passé. Sur la base de quelle qualification Oumar Tchomogo fut nommé sélectionneur national en 2015 ? Quelles étaient ses expériences, lui qui n’avait jamais entraîné un club de Ligue 1 ou 2 au pays où ailleurs pour qu’il soit désigné au poste de sélectionneur national ? Idem pour son adjoint, Vizir Touré, inconnu au bataillon mais propulsé à ce poste très stratégique alors que des valeurs sûres et plus capées étaient là. Qui était l’équipementier des Écureuils à cette époque ? Quid de Laurent Djaffo, manager de joueurs et manager général des Écureuils ? N’était – il pas trop tôt de confier une si lourde responsabilité à Oumar Tchomogo ?
Les exemples de Feu Stéphane Késhi au Nigéria, Florent Ibengué en RDC ou encore Aliou Cissé au Sénégal… sont illustratifs des parcours cartésiens qui amènent logiquement et indubitablement au sommet. Mieux, dans ces conditions, ils ne sont même pas à l’abri de vives critiques suite à des contres performances. C’est la dure réalité du sport et du football en particulier.
Dans l’univers des Écureuils, l’attelage étant solidement ancré, l’axe Cotonou-Niort venait de naître. Le Bénin a disposé d’une forte colonie de joueurs à Niort, tous dans l’écurie Djaffo, ce qui n’est pas à priori une mauvaise chose car assez de viandes n’a jamais gâté une sauce dit-on. Le hic se trouve dans la gestion de cette colonie niortaise qui était systématiquement convoquée même si certains étaient en baisse de forme. Comment peut-on expliquer une telle situation ? L’équipe nationale était-elle devenue un passage obligé pour rebondir de l’autre côté ?
Laurent Djaffo ancien joueur de Niort, Manager général des Écureuils, ancien coéquipier d’Oumar Tchomogo en sélection, avec une forte colonie niortaise sélectionnée en son temps. S’agit-il aujourd’hui du retour de l’ascenseur trois ans après son limogeage ? Juste des constats et questionnements. Les réponses permettraient de comprendre les 26 longs mois de supplices infligés au peuple béninois en termes de contre-performances et surtout la non-participation à la CAN 2017.
Des joueurs sacrifiés sur l’autel des intérêts personnels
Pendant que l’équipe nationale affichait des signes de fébrilité dans tous les compartiments de jeux, des joueurs-cadres de l’effectif se sont vus écartés tout simplement de la sélection nationale pour des raisons fallacieuses extrasportives.
Sur la liste, nous retrouvons Mouri Ogounbiyi, le joueur béninois le plus titré à ce jour avec deux titres de champions d’Afrique en clubs (Enyimba 2004, Étoile Sahel 2007), une coupe CAF (Étoile Sahel 2006), deux super coupes d’Afrique 2004-2007, demi-finaliste de la coupe du monde des clubs 2007, trois CAN (2004, 2008, 2010), vainqueur de la Coupe de France (Guingamp 2009) sans oublier plusieurs remontées en échelons supérieurs avec des clubs dans l’Hexagone. Jusqu’en 2016, il était encore opérationnel avec Paris FC en Ligue 2, mais il fut rapidement jeté aux oubliettes alors que son expérience et sa présence dans le groupe auraient été utiles pour la jeune génération.
L’autre joueur qui a disparu miraculeusement de la sélection, c’est Razack Omotoyossi. Il eut un parcours atypique certes avec une dizaine de clubs entre 2005 et 2017, mais son efficacité en équipe nationale inspirait respect et considération. Il demeure le deuxième meilleur buteur des Écureuils avec 21 buts en 47 apparitions officielles derrière Sessegnon Stéphane.
Rudy Gestede qui était en Premier Ligue anglaise entre 2015 et 2017 avec Aston Villa et Middlesbrough devrait se contenter quant à lui du statut de remplaçant au profit de Jacques Bessan qui évoluait en Tunisie. Comment peut-on expliquer qu’un joueur, habitué de la Premier Ligue anglaise, le championnat le plus relevé au monde en termes d’intensité et d’engagement physique soit déposé sur le banc de touche en sélection nationale pour un autre, techniquement et tactiquement moins aguerri ? Logiquement, Rudy Gestede selon des sources bien renseignées décida de mettre sa carrière internationale entre parenthèses avant de répondre favorablement aux appels de Dussuyer même si des ennuis de santé ne lui ont pas permis de faire son come-back officiel.
On peut citer aussi le cas Romuald Boco qui totalisait 10 ans de sélections au poste d’arrière-droit avec 46 apparitions officielles pour un but. Il fut contraint de s’éclipser non pas parce qu’il a raccroché ou était en baisse de forme. Bien au contraire, de 2016 à 2017 il fut une pièce maîtresse de Accrington Stanley en D3 anglaise. Il ne se sera jamais convoqué en équipe nationale de juin 2015 à septembre 2017 alors que personne n’a pu faire mieux à son poste à ce jour. D’ailleurs, sa culture tactique largement au-dessus de la moyenne a fait de lui, un joueur inamovible à ce poste durant une décennie sous plus de six sélectionneurs. Rappelons que depuis 2004, il reste le plus jeune joueur béninois à disputer une CAN à 18 ans.
Le natif du Couffo, Mohamed Aoudou, »Joker » de luxe en équipe nationale aura connu le même sort que les premiers cités.
De l’eau a coulé sous le pont et ces » bannis » ont commencé par évoquer les raisons qui seraient à la base de leurs absences surprenantes en équipe nationale sous l’ère Tchomogo. En attendant de revenir plus tard sur ces troublantes révélations, une chose est sûre, on retient qu’il y aurait eu tout sauf une orthodoxie en termes de gestion et de management de l’effectif des Écureuils entre juin 2015 et septembre 2017. Conflits d’intérêts, favoritisme et bien d’autres fourberies dignes d’une époque révolue ont été entre autres, des facteurs prépondérants ayant conduit à des performances peu enviables.
C’est un secret de polichinelle que le haut niveau a des exigences. Et, l’encadrement technique était à mille lieues de satisfaire à ces exigences puisque, limité tactiquement. Pire, leurs conditions de nomination seraient douteuses et c’est le lieu d’interpeller ceux qui ont par magie, trouvé en Oumar Tchomogo le profil idéal pour occuper le poste de sélectionneur national même avec zéro expérience en matière de coaching d’une équipe en son temps. Après trois CAN au format à 16 en 2015, le Bénin était devenu une nation respectée pour qu’on s’amuse jusqu’à ce point en nommant un novice pour coacher l’équipe A. Avec les nombreuses valeurs locales qui ont fait leurs preuves ici et même sur le continent africain, il n’y avait que lui pour occuper le poste ?
Michel Dussuyer, l’homme des défis
Avec les mêmes joueurs à une ou deux exceptions près, Michel Dussuyer réalisa l’exploit en se qualifiant brillamment à la CAN 2019. Inutile de revenir sur le bilan très élogieux des Écureuils qui aurait pu ne pas se qualifier si le règne de la médiocrité n’était pas vaincu grâce au ministre des Sports, Oswald Homeky et le président de la Fbf, Mathurin de Chacus. Dans un scénario cauchemardesque où Tchomogo était toujours aux commandes, pouvait-on battre l’Algérie et le Togo pour glaner les six précieux points qui ont propulsé le Bénin à la CAN ? Avait-il les ressources nécessaires pour faire le parcours honorable à la dernière CAN s’il était là ? Juste des questionnements.
Rappelons qu’en dehors de 2019, Michel Dussuyer a déjà qualifié le Bénin à la CAN 2010 et Wabi Gomez, le plus ancien des techniciens béninois en activité en a fait de même pour la CAN 2008. Le Bénin dans le gotha du foot étant désormais dans le top 20 africain, le bon sens voudrait qu’on soit dorénavant très exigeant et pointilleux en ce qui concerne le choix du sélectionneur national pour ne plus revivre le même scénario entre 2015 et 2017.
Outre l’équipe A et les A’, toutes les catégories d’âge sont concernées par cette nouvelle dynamique de » l’homme qu’il faut à la place qu’il faut » qui fonde la gouvernance actuelle incarnée par le ministre Oswald Homeky. Qu’ils soient des nationaux (ce qu’on souhaite vivement) ou des étrangers, tous les sélectionneurs doivent être jugés sur la base des objectifs de départ clairs et précis. Plus de place donc à la légèreté, à l’amateurisme et au copinage.
Bossikpon Dankoli