Roch Gnahoui David à propos des polémiques autour des décisions de la cour constitutionnelle durant ces deux années
« L’institution ne doit pas céder aux critiques »
6 juin 2018 – 6 juin 2020, cela fait exactement deux ans que la Cour Constitutionnelle béninoise est dirigée par l’un des professeurs les plus suivis des universités d’ici et d’ailleurs, le Professeur Joseph Fifamin Djogbenou. Pendant ces deux années, beaucoup, pour des raisons inavouées, n’ont pas compris la logique juridique du nouveau locataire de la Cour et ses pairs. En cette période anniversaire d’investiture, le Prof Roch Gnahoui David, agrégé des facultés de Droit, Avocat au Barreau du Bénin, Doyen de la Faculté de Droit de l’Uac, demande à la Cour de ne pas céder aux critiques qui d’ailleurs ne manqueront pas.
Bonjour Professeur! Veuillez-vous présenter?
Je m’appelle Roch Gnahoui DAVID, Doyen de la Faculté de Droit de l’UAC, Avocat au barreau du Bénin.
La Cour Constitutionnelle du Bénin est en train de célébrer cette semaine ses deux ans d’installation. On a vu comment cette Cour a travaillé depuis son installation. De votre position, comment est-ce que vous appréciez le fonctionnement ?
En tant que Juriste, j’applaudis. Je me réjouis parce que vous avez une Cour qui travaille. Les décisions qui sont rendues sont quasiment dans l’ordre de l’évolution voire de révolution, aujourd’hui. En deux ans, c’est formidable. Ça veut dire que ça travaille. Ça veut dire que la démocratie prend encore davantage son élan, son essor. Tout le monde peut ne pas être d’accord parce que ça peut ne pas arranger telle personne au point de vue du contenu de la décision rendue par la Cour. Mais, fondamentalement, il y a une avancée. Avancée dans la protection des droits de l’homme, avancée surtout dans le respect du principe de la légalité parce qu’il y a des décisions dans lesquelles nous avons estimé que véritablement il fallait remettre les gens dans leur droit. Il faut applaudir ce travail accéléré, ce travail soutenu de la Cour. Il faut encourager davantage cette cour sur cette même lancée. En tout cas, je respecte ce que la Cour fait. Je tire mon chapeau au président de la cour et aux membres de la Cour.
Vous étiez en train de dire que tout le monde ne peut pas être d’accord. Est-ce qu’on peut dire que ces décisions prises sont liées au contexte politique actuel ? Ou bien, on a la possibilité de faire une comparaison avec l’ancienne Cour ?
Si vous parlez de contexte politique, vous allez me dire que les décisions sont quasiment des décisions politiques rendues par une Cour. Or, ce n’est pas la qualification qu’il faut retenir. La Cour prend des décisions qui au plan juridique s’appuient sur la Constitution. Il y a une logique juridique qui est mise en place. Il y a eu une évolution de la jurisprudence. N’oublions pas que la Cour est une institution qui tranche en dernier ressort. Ses décisions ne sont susceptibles d’aucun recours. Elle peut décider à un moment donné de revenir sur une décision. Elle peut considérer que telle décision est très bonne. Ainsi, continue-t-elle dans cette même lancée. D’où l’expression jurisprudence de continuité ou de jurisprudence unanime. Ceux qui ne sont pas d’accord aujourd’hui ne peuvent nous dire que la Cour ne travaille pas. Évidemment, quand on va devant une juridiction ou une institution, on ne peut pas forcément avoir gain de cause. Ce n’est pas possible ! La Cour tranche par rapport à l’évolution des règles qui concernent la construction de la société. Il faudrait que le Droit évolue. Qu’on analyse le Droit d’une autre manière qui permet à la population de sentir que ce droit est au service du développement. C’est ce que la Cour fait. Tout le monde ne comprendra pas aujourd’hui. Je suis certain que demain, les gens diront que la cour a fait un travail formidable.
Un dernier mot professeur?
Que la Cour continue son travail. Quelle Cour constitutionnelle n’est pas exposée aux critiques? Qu’elle ne soit pas démontée par les critiques. Les critiques, il y en a et il y en aura toujours. Elle a été investie d’une mission de rendre des décisions conformément à la Constitution. Qu’elle continue son travail, peu importe les détracteurs. Si certains estiment que cette Cour ne doit pas exister, que ces personnes fassent le nécessaire pour qu’elle disparaisse. Ça m’étonnerait parce que c’est un pilier fort de la société béninoise, du droit béninois et de la société nationale. Aux citoyens, je voudrais demander de faire confiance à la Cour. La Cour va démontrer par ce qu’elle fait encore que le Bénin va grandir davantage.