Insatisfaction d’un client après achat d’un véhicule pick-up neuf: la société CFAO Motors engluée dans un contentieux judiciaire
Quand le produit au cœur des relations transactionnelles perd de son éclat, les réserves peuvent naître et conduire à un contentieux entre les parties contractantes. Cette réalité n’est pas altérée. Elle ne l’a pas été dans un différend qui oppose la société CFAO Motors à l’un de ses clients. Ayant une réputation dans le secteur de la vente des moyens roulants, la société CFAO Motors est actuellement engluée dans une procédure judiciaire. Devant les juridictions béninoises, un client insatisfait de l’état d’un véhicule pick-up immatriculé BY 0015, payé le 23 juillet 2021, attend que la société CFAO Motors assume entièrement sa part de responsabilités. Les problèmes ont commencé quelques semaines seulement après l’acquisition de la voiture. Selon le récit des faits, trois mois après l’achat du véhicule, le client a été confronté à un problème de vibration et tirage à droite au freinage. C’est quand même une voiture neuve. Le client va alors solliciter les services techniques de la société CFAO Motors qui, après plusieurs tentatives de réparation, n’ont pu résoudre la panne. Échec ! Le service après-vente de la société CFAO Motors n’a pu apporter une solution satisfaisante au problème. Le client victime qui conduit le véhicule vit toujours avec anxiété ce phénomène de véhicule tirant vers le côté droit. Le pire va se produire après une énième tentative de réparation le 29 avril 2022. Ici encore, les services techniques de la société CFAO Motors n’ont pas réussi malgré toute » l’expertise » déployée. Le 30 avril 2022, le client a entrepris de faire un essai afin de se convaincre que l’effort de la veille a servi à quelque chose. Malheureusement la voiture a encore tiré vers le côté droit au freinage occasionnant ce jour-là un grand accident. Au regard des faits et surtout de l’échec lamentable des services techniques de CFAO Motors à résoudre le problème, le client se met à soupçonner un défaut de fabrication. La société CFAO Motors va contester cette hypothèse conclusive du client et commettre un expert aux fins de produire un rapport sur les faits.
Un rapport d’expertise discutable
L’expertise, pour qu’elle ne souffre pas d’objectivité, doit se revêtir des minima de science. En la matière, le principe du contradictoire, des données croisées, de la triangulaire et de l’impartialité sont scrupuleusement recommandés. Seulement, le narratif existant dans ce contentieux entre la société CFAO Motors et son client est loin d’attester du respect de ces principes basiques. Alors que le contentieux est ouvert autour de la reconnaissance d’un défaut de fabrication du véhicule pick-up, la société CFAO Motors, parallèlement aux travaux d’expertise, a saisi par le truchement de son avocat-conseil le président du tribunal de commerce. Le tribunal demande à la société CFAO Motors de procéder à une expertise par ordonnance à pied de requête en date du 18 mai 2022. Ladite ordonnance recommande aussi d’en notifier au requis. Mais à l’opérationnel, les travaux devant permettre à la rédaction du rapport d’expertise ont été menés à l’exclusion du client victime. Jamais, ce client n’aura été associé par l’expert partenaire de la CFAO qui se trouve être le même expert choisi à la suite de l’ordonnance à pied de requête. Si dans la collecte des données, l’expert n’a pas cru devoir prendre en compte les opinions et pièces à conviction du client victime, tous les esprits avertis n’hésiteront pas à conclure qu’il s’agit d’un rapport d’expertise parcellaire, partiel, superficiel et à la limite tendancieux. Or, un rapport tendancieux, peut être le choix délibéré d’un expert commis par une société visiblement accusée d’avoir livré un produit défaillant et qui ne souhaite pas assumer ses responsabilités. Surtout qu’il s’agit d’un expert commis par la société CFAO Motors et requis par l’ordonnance du tribunal de commerce. Et ceci, dans un contexte où le client victime ne reconnaît pas avoir été associé pour mettre à la disposition de l’expert ses opinions. Par ailleurs, l’expert commis par la société CFAO Motors est aussi blâmé par certaines sources d’avoir fait le choix de se limiter au rapport du PV de la police Républicaine. Ici, les données du PV auraient été exploitées sans aucune information complémentaire provenant du terrain, c’est-à-dire des témoins oculaires présents sur les lieux de l’accident et du constat visuel du lieu de l’accident.
Doute autour des conclusions d’un rapport controversé
Si la procédure de rédaction du rapport d’expertise est trempée dans un océan de critiques, ses conclusions le sont encore plus. Selon nos sources, dans son rapport, l’expert évoque deux hypothèses qui pourraient expliquer les causes de l’accident. La première cause serait liée de façon intrinsèque au véhicule. Quant à la seconde cause, elle serait liée à un facteur exogène notamment l’excès de vitesse. Alors qu’il y a deux causes possibles, l’on s’étonne de constater que l’expert a fini par trancher de façon péremptoire dans la conclusion finale : « (…) nous déclarons que l’accident est dû à un excès de vitesse, soit environ 100km/h dans un virage et à un moment où la visibilité était mauvaise », lit-on dans la conclusion finale du rapport de l’expert en date du 1er juin 2022. La rédaction de votre journal a d’ailleurs eu copie du rapport de l’expert. La collecte des informations alternatives a permis de se rendre compte que dans le Procès-verbal de constat de l’accident de la police Républicaine, les termes utilisés pour décrire les causes de l’accident sont en opposition avec la conclusion finale de l’expert de la société CFAO Motors. Dans ce procès-verbal dont nous avons copie, il est conclu « que l’accident est dû à une défaillance mécanique du véhicule de marque Toyota pick-up qui s’est déporté à droite au moment du freinage par le conducteur ». Cette conclusion renvoie au problème de tirage à droite au freinage dont se plaignait le client victime trois mois après l’achat du véhicule. Problème que, on s’en rappelle, les services après-vente de la société CFAO Motors n’ont pas satisfait le client, ou du moins, n’ont pas réussi à résoudre et qui a fini par créer un accident. C’est donc à raison que le client victime émet des doutes sur l’objectivité des conclusions de l’expert qui a choisi d’indiquer » l’excès de vitesse » comme étant la cause de l’accident. L’expert ignorait-il que les équipes de dépannage de la société CFAO Motors ont échoué à régler ce problème de tirage à droite au freinage ? Ignorait-il aussi que la voiture payée est neuve, et que, de ce fait, trois mois après son achat, un tel problème persistant et non résolu relève de la responsabilité du vendeur qui, selon les clauses du marché, se doit de s’assurer de la qualité des produits qu’il livre ? Quoi qu’il en soit, les contours de ce dossier sont encore flous. Les esprits éclairés ont du mal à avaler la conclusion de l’expert qui pèche pour n’avoir pas pris en compte le problème incurable d’un tirage brusque à droite à chaque petit freinage et des interventions infructueuses de l’équipe de dépannage de la société CFAO Motors. On parle bien d’une voiture neuve et non d’un véhicule d’occasion sorti de la boutique d’à côté.
L’attente d’un verdict
Le contentieux qui oppose la société CFAO Motors et son client victime est connu des juridictions béninoises. Le dossier de l’accident a été déféré devant le tribunal de Lokossa qui a vidé l’affaire le mercredi 25 janvier 2023. Statuant publiquement, contradictoirement en matière correctionnelle, flagrant délit et en premier ressort, le tribunal « déclare que les faits de blessures involontaires et de complicité de défauts technique sur le véhicule mis en cause reprochés à CFAO Motors ne sont pas constitués ». Selon nos sources, cette décision a fait objet d’appel. C’est la cour d’appel d’Abomey qui doit connaître de cette affaire les semaines ou mois à venir. Selon nos sources, à la suite de la décision en 1ère instance, le client victime a exprimé le besoin d’entrer en possession de son véhicule cabossé se trouvant au garage de CFAO depuis plus d’un an. Il est question pour le client victime et agacé de faire sa propre expertise pour disposer d’un rapport alternatif. Mais là encore, échec. La société CFAO Motors aurait refusé de mettre à la disposition du client victime la voiture cabossée qui reste quand même un bien acquis par le client. Quelle est la logique qui fonde ce refus, bien malin qui pourra le dire.
Brivaël Klokpê Sogbovi