Mise à la retraite d’office des agents des forces de sécurité et de défense : Ça gronde chez les flics, des »maladresses » contestées
Pas si sûr que cette décision passe comme une lettre à la poste. La mise en retraite anticipée de certains agents régulièrement en activité au sein des Forces de défense et de sécurité (Fds) est déjà au cœur d’une vaste campagne de chuchotement laissant transparaître le mécontentement, des questions, des doutes et des sentiments d’injustice et de frustration. 315 fonctionnaires à la police républicaine, 30 fonctionnaires de la douane, 17 agents des eaux et forêts et d’autres fonctionnaires de l’armée béninoise sont depuis quelques jours seulement poussés à la porte de la fonction publique. Ils ne font plus partie du personnel actif de l’État au sein de ces corporations.
En vertu de certaines lois spécifiques votées en 2020 et dont les décrets d’application ont été pris en ce mois de janvier 2024, le gouvernement a décidé de mettre ces agents à la retraite d’office. La décision de mise à la retraite d’office n’a donc pas été prise hors couloir légal. Mais les effets des décrets d’application pris et signés près de 4 ans après l’adoption des lois en 2020 induisent un paradoxe sentimental. D’un côté, certains fonctionnaires de police mis à la retraite d’office ne cachent pas leur joie. «C’est une libération», s’écria un certain nombre d’entre eux qui sans doute vivaient difficilement dans la peau de policier ces derniers mois.
D’un autre côté, cette décision agace dans le rang des fonctionnaires de police qui voient d’un mauvais œil ce départ «inattendu, prématuré et précoce » à la retraite. Cette position est-elle infondée ? Visiblement non au regard des questionnements soulevés par les concernés. Dans le lot de ces désormais »retraités prématurés », il y a certains fonctionnaires de police qui ont pris service en 2004, mais devraient encore faire beaucoup de mois avant de boucler les 20 ans de service régulier.
D’autres fonctionnaires de police ont pris service en 2005 et donc sont en train de faire 19 ans de service régulier. Toujours à la police républicaine, le cas d’un commissaire qui aurait pris service en 2007 interpelle les consciences des flics »fâchés ». Comment ce commissaire et d’autres fonctionnaires n’ayant pas encore bouclé les 20 ans de service ont-ils pu se retrouver miraculeusement sur cette liste des agents mis à la retraite d’office ?
La question trottine dans la tête des flics et alimente des bruits de bottes. Un autre corps est au bout des lèvres. Il s’agit des eaux et forêts. Ici, les plaintes concernent le cas de deux (2) agents qui n’ont pas atteint les 20 ans de service régulier. Mais leurs noms de retrouvent sur cette liste des agents à »retraiter ». Dans un État de droit, les institutions compétentes doivent se préparer à tisser le fil de l’arbitrage des contentieux.
Les agents ainsi mis à la retraite d’office et qui soulèvent des questionnements sans réponse vont probablement saisir la chambre administrative de la Cour suprême les prochaines semaines. L’État employeur qui a pris cette décision devra aller s’expliquer avec deux issues possibles, soit il perd la face et sera contraint de revoir sa copie en réintégrant les fonctionnaires précipités vers la retraite, soit il démontre et convainc les juges de la légalité de l’acte, auquel cas, les fonctionnaires plaignant seront définitivement obligés d’accepter leur statut de retraités.
Mais rien n’est sûr. Le gouvernement est attendu sur ce dossier dans un contexte où d’autres agents ayant fait déjà plus de 25 ans de service n’ont pas été envoyés à la retraite d’office alors que d’autres ayant fait moins de 20 ans l’ont été. Quelles sont les motivations réelles de cette décision qui laisse assez de questions et nourrit, dans le rang des flics, un sentiment de frustration ?
La communication du gouvernement devra déjà apporter des éléments de réponse à ces questions pour éviter les revers des non-dits dans un dossier aussi sensible que celui des personnes formées à la manipulation des armes.
B. K. S