Bénin/Avortement en milieu scolaire : Un redoutable tueur d’adolescentes

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Beaucoup d’élèves ayant contracté une grossesse préfèrent recourir à l’avortement non sécurisé, car il n’existe pas pour le moment, disent-elles des centres de santé pouvant leur permettre de faire recours à un avortement sécurisé. Elles s’y adonnent en banalisant toutes les conséquences que cela pourrait entrainer.  C’est ainsi que dans la matinée du samedi 7 novembre derrière l’Institut biblique des Assemblées de Dieu de Dassa-Zoumè (département des Collines), le corps sans vie d’une élève nommée Firmine H. a été retrouvé. Chose curieuse, sa dépouille a été retrouvée avec des comprimés de Sédaspir (des comprimés, selon les rumeurs, réputés pour faciliter l’avortement).

Selon les premiers témoignages, la jeune élève était enceinte et voulait s’en débarrasser ; d’où son orientation vers ses comprimés qui ont fini par avoir raison d’elle. Bignon S., élève à Parakou, a eu la vie sauve grâce à une intervention chirurgicale qui a entrainé une salpingectonie (l’ablation des deux trompes). Elle, contrairement à Firmine H., a eu recours à une méthode traditionnelle auprès de l’une de ses copines réputées en matière d’avortement au sein de son établissement. Ces deux pouvaient échapper à ses conséquences désastreuses, si elles avaient pu être orientées vers les bonnes personnes, mais malheureusement elles ne disposent pas d’assez d’informations pouvant leur permettre d’éviter les conséquences liées aux avortements non sécurisés.

De nos investigations, il ressort que nombreuses sont ces élèves qui meurent pendant ou après un avortement non sécurisé. Dans les établissements de Cotonou, Porto-Novo, Bohicon, Parakou, les chefs d’établissement ont confié que, sur 10 cas de décès au niveau des adolescentes, 8 sont liés à des avortements non sécurisés.

De tout ce qui précède, il ressort que les avortements non sécurisés constituent de redoutables tueurs d’adolescentes.

Dans le rapport « Conclusions de l’analyse situationnelle : besoins et opportunités pour une prise en charge des soins complets d’avortement en Afrique de l’Ouest francophone », il est écrit en page 24, au sujet du cas du Bénin : « L’étude la plus récente, de 2014, relative à l’avortement au Bénin est une étude sur cinq ans menée dans trois hôpitaux qui a révélé que 3 139 femmes avaient été hospitalisées pour des avortements incomplets, sur lesquels 630 n’avaient pas nécessité de soins, 1 277 avaient été traitées par AMIU et 537 par administration de misoprostol. L’âge gestationnel des femmes hospitalisées était principalement inférieur à 10 semaines (64 %), 14,9 % des autres patientes avaient une grossesse de 11 à 12 semaines, 13 % de 13 à 14 semaines et 8 % de 15 à 18 semaines ». Ces statistiques prouvent bien que le mal existe, mais on évite d’en parler.

La stigmatisation et la croyance religieuse favorisent les avortements non sécurisés

Au regard de l’ampleur que prennent les avortements à risque en milieu scolaire, il est important de sensibiliser cette couche sensible en vue de réduire les conséquences liées à cette pratique. Gisèle H. est censeure dans un établissement de Cotonou. Elle confie qu’elle a été surprise quand elle a appris que l’une des élèves de son établissement qui était à quatre mois de grossesse s’est fait avorter malgré l’opposition de ses parents.  Interrogée par la censeure, l’élève a affirmé qu’elle en avait marre d’être la risée de tout son établissement. C’est d’ailleurs la raison qui l’a poussée vers cette pratique. Heureusement pour elle, elle s’en est sortie vivante.

Banniere carrée

Un gynécologue officiant à Porto-Novo (capitale du Bénin) confie, sans ambages, que peu importent les cas, lui il ne pratiquera jamais l’avortement à une patiente. « Ma foi et ma religion ne me permettent pas de commettre un meurtre », lance-t-il. Néanmoins, il reconnait que certains de ces collègues s’y adonnent. La stigmatisation et le regard de certaines personnes pouvant conduire les jeunes filles à pratiquer un avortement sécurisé font qu’elles préfèrent avoir recours aux avortements non sécurisés.

Les avortements non sécurisés, sources d’enrichissement 

Des témoignages reçus des élèves de plusieurs établissements, il ressort que des agents de santé et même des particuliers sont devenus des spécialistes des avortements non sécurisés. Sous anonymat, l’un d’eux confie que beaucoup de femmes issues de toutes les catégories font recours à son expertise dans le domaine.

Au regard de cela, les prix sont fixés à la tête de la cliente 5 à 10 mille chez les élèves, 15 à 25 mille chez les étudiantes, à partir de 30 mille chez les adultes. Ce spécialiste très recherché par les femmes pour les avortements à risque affirme qu’il fait un chiffre d’affaires allant de 600 mille à 1 million par mois. Conscient des risques que ces femmes courent, il souhaite qu’une sensibilisation soit faite désormais et qu’on cesse de faire des questions d’avortement un mythe dont personne ne parle, mais qu’on pratique en douceur.

Il faut noter que ce dernier est devenu un spécialiste des avortements à risque grâce à des recettes qu’il a apprises auprès de son père, un guérisseur traditionnel.

De leur côté, les élèves des établissements sillonnés ont exprimé le besoin de se faire sensibiliser aux risques qu’elles courent en s’adonnant aux avortements à risque. Elles souhaitent qu’une ligne verte soit ouverte pour les cas d’avortement.

Le corps sans vie d’une élève retrouvé avec des comprimés de sédaspir

 

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