Adidjatou Mathys au sujet des réformes à la Fonction Publique : Tous les concours organisés … sont transparents

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L’objectif à terme, c’est une administration moderne au service des populations ; une administration qui met les cadres dans de bonnes conditions de vie et de travail et qui offre les mêmes conditions, les mêmes chances à tous les citoyens désireux d’entrer à la fonction publique. Quatre ans après, où en est-on par rapport au pari ? Le ministre du Travail et de la Fonction Publique Adidjatou A. MATHYS fait le bilan des actions d’envergure et des grandes réformes engagées par son département ministériel en quatre années de gouvernance et leurs impacts.

 

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Journaliste : Madame Adidjatou MATHYS, quel visage présentait la fonction publique Béninoise dès l’arrivée du Président Patrice Talon en Avril 2016 ?

 

Adidjatou A. MATHYS : Comme vous le savez, le Ministère du Travail et de la Fonction Publique était un peu détesté des usagers/clients en ce sens que l’opinion publique a l’impression que c’est un ministère qui dort et qui met énormément de temps dans la gestion de la carrière des agents de l’État et même de ceux qui sont admis à la retraite.

 

Ce qui a conduit à la dématérialisation, à la modernisation de la fonction publique aujourd’hui. Parlez-nous de ces actes de dématérialisation que vous avez instaurés dans votre ministère.

 

Comme vous le savez, après son accession au pouvoir, le Président Patrice TALON, sur la base de son projet de société a mis en place un ambitieux Programme d’Action du Gouvernement pour la période 2016-2021, un ambitieux programme à la hauteur des défis qu’il fallait relever pour mettre notre pays sur l’orbite du développement. Dès cet instant, tous les membres de son Gouvernement se sont activés pour la mise en œuvre de ce programme. Dans l’architecture gouvernementale mise en place, le Ministère du Travail et de la Fonction Publique occupe une place plus ou moins importante en ce sens qu’il s’agit d’instaurer une administration qui soit véritablement au service du développement de toute la nation par la mise en œuvre de l’action N° 1 intitulé « dynamiser et moderniser l’administration » de l’axe 2 « améliorer la gouvernance » ; du pilier 1 du PAG intitulé « Consolider la démocratie, l’état de droit et la bonne gouvernance ». Donc le Ministère du Travail et de la Fonction Publique ne pouvait rester en marge de la nouvelle dynamique. On s’est alors mis au travail pour réfléchir, concevoir et mettre en œuvre un certain nombre de réformes.

 

Des reformes qui rendent aujourd’hui l’administration publique Béninoise plus moderne. Vous avez même une équipe numérique au sein de votre ministère, mais pourquoi la mise en place de cette équipe ?

 

C’est tout simplement parce que, lorsque je suis arrivée à la tête du ministère et en faisant le point des effectifs, j’ai remarqué qu’il y avait un certain nombre d’informaticiens qui n’étaient pas utilisés. J’ai donc échangé avec eux et ils m’ont dit que si leurs capacités sont renforcées, ils pourront faire des merveilles. Nous nous sommes mis à la tâche et nous avons commencé par la réforme de l’organisation des concours. Vous savez très bien que jusqu’à une époque récente, avant l’avènement du régime, il y avait des concours organisés qui ne donnaient pas satisfaction à la population. Nous avons de ce fait, conçu un module et nous avons ensuite mis en place une plateforme centrale de pilotage et de gestion des concours qui a pour finalité la gestion des dossiers des candidats, le classement des candidats par centre et par salle de composition et c’est par un SMS qu’on leur indique le centre dans lequel ils vont composer ainsi que la salle. Nous avons ensuite le module de gestion du secrétariat. Il y a l’identifiant pour pouvoir faire l’anonymat. Au niveau du secrétariat, il y a la correction par les jurys et la saisie des notes et c’est presque difficile de changer les notes parce que lorsque vous le faites, le système le signale automatiquement. Après, il y a la délibération. Au niveau de la délibération, les membres du jury font également un classement à l’aide de la machine qui fait ressortir les plus méritants. Par exemple si on veut recruter cent personnes et qu’il y a mille qui ont composé, ce sont les cents premiers ressortis par la machine que nous prenons, sans favoritisme, et sans considération politicienne. D’ailleurs, la proclamation se fait sur place avec la publication immédiate. Il s’est agi pour nous de mettre en place un système transparent et crédible de recrutement à la fonction publique et c’est le mérite qui est le critère de choix.

 

Vous évoquez les concours frauduleux, cette grosse plaie que traînait donc l’administration publique. Le Bénin, il en est guéri aujourd’hui ?

 

Tous les concours organisés sous la Rupture jusqu’à présent, sont des concours transparents. Nous avons même eu quelques procès. Il y a des candidats qui ont estimé qu’ils ont travaillé et s’interrogent du fait qu’ils ne sont pas admis. Ils ont saisi l’ANLC qui est venu nous voir. Il y a eu près de quinze recours qui ont été vidés au profit de l’administration. En matière de concours, tout se fait sur place jusqu’à la proclamation et la publication. Les résultats ne vont pas d’abord au ministère ou à la présidence où ils vont encore restés pendant quelques mois comme par le passé avant d’être proclamés. Je puis vous assurer qu’avec notre système de gestion des concours aujourd’hui, il s’écoule deux semaines maximum entre l’organisation de concours et la proclamation des résultats, contrairement au passé où il fallait à peu près cinq ou six mois avant de parvenir à la proclamation des résultats.

 

Puisqu’on évoquait là, les plaies de l’administration publique, permettez-moi de revenir sur certaines autres plaies de l’administration, il s’agit de l’absentéisme, des retards, de la désinvolture surtout dans le service rendu au public. Comment faire pour que ces plaies soient également extirpées de l’administration publique béninoise ?

 

Vous savez, dès ma prise de fonction, la lutte contre l’absentéisme et les retards a été l’une de mes préoccupations au point où j’ai proposé que nous puissions mettre au niveau des structures administratives, des portiques magnétiques pour contrôler la ponctualité des agents et leur assiduité au travail mais cela n’a pas prospéré parce qu’il m’a été tout de suite rappelé qu’il y a eu une phase pilote qui s’était déroulée entre 2010-2012 et cela n’a pas été concluant. Ce n’était donc pas la solution et notre État n’avait pas les moyens de cette politique-là. Alors, qu’est-ce que j’ai fait ? Vous savez qu’au niveau du Ministère du Travail et de la Fonction Publique, nous avons un corps dénommé Inspection Générale des Services et Emplois Publics (IGSEP) qui a une compétence nationale. J’ai donc déployé les Inspecteurs pendant près de deux ans dans toutes les structures administratives. Je lisais la dernière fois le rapport de l’IGSEP et j’ai été émue de constater qu’il a été indiqué que début 2016, le retard dans l’administration était de 66% et que fin 2017, cela a régressé de 35%. Cela montre que les contrôles ont beaucoup porté. Il faut dire que déjà à l’avènement de la rupture, il a été constaté qu’il y a la crainte de l’Autorité. Depuis lors, nous avions déjà noté qu’il y avait moins de retard et d’absentéisme dans les bureaux mais les contrôles ont permis de les améliorer. Mais il est question pour les ministères sectoriels de prendre le relais. Il faut le contrôle hiérarchique. Le contrôle peut nous sortir de l’absentéisme et des retards dans les services et puis, il y a une étude qui a été commanditée dans un autre cadre et qui nous a révélé aussi que les horaires actuels de travail sont aussi sources des retards, parce que les agents sortent à 18h 30. Le temps de rentrer, il est 20h. D’autres, du fait des embouteillages attendent tard avant de rentrer, surtout ceux qui sont en dehors de Cotonou qui rentrent généralement à 22h à la maison et doivent revenir très tôt au service, cela constitue un problème pour eux. Je crois que par rapport à ce volet, le Gouvernement s’apprête à prendre des dispositions. Je ne voudrais pas en parler ici. Vous serez bientôt au courant mais il faut exhorter les responsables à procéder à des contrôles réguliers de ponctualité et de présence dans les services.

 

On va passer maintenant à la dématérialisation à proprement parlé. Madame le Ministre, aujourd’hui c’est plusieurs milliers de pièces et d’actes des agents qui sont en ligne. Dites-nous, qu’est-ce que l’État y gagne ?

 

Je voudrais dire avant de répondre à votre question que pour optimiser la gestion des ressources humaines de l’Etat, nous avons mis en place un Système Intégré de Gestion des Ressources Humaines (SIGRH). Nous avons mis en place une plateforme de vingt ordinateurs. C’est une plateforme d’information, de gestion et de formation des agents des ministères sectoriels. Ce sont eux qui viennent travailler sur la plateforme avec l’assistance de mes agents. Depuis ce temps, ils viennent travailler sur cette plateforme qui leur facilite la tâche. Il y a eu des témoignages de satisfaction dans ce sens. Ce qui se faisait en un mois, ils le font aujourd’hui en une semaine. Nous sommes connectés à SUNKWE qui est le logiciel de paiement des salaires et les actes sont pris dans le système. Cela permet au Ministère de l’Economie et des Finances d’actualiser le salaire de l’agent. Les arriérés, c’est à payer plus tard. Le SIGRH est également connecté à SICOPE qui est le système de gestion des pensions. Cela permet au système de garder les actes des agents, ce qui permettra le moment venu, pour liquider la pension, d’avoir ces actes sous la main. Il est également connecté au système de gestion des concours. Dès lors que vous êtes admis au concours, le système vous attribue rapidement un numéro matricule.

De mon point de vue, l’intérêt de la dématérialisation pour l’administration, c’est d’abord de renforcer les bases d’une administration de développement. En ce sens que l’administration devient plus performante, plus efficace et plus efficiente pour mieux satisfaire les usagers clients. C’est aussi que l’administration fait quand même des économies d’échelle, parce que l’utilisation des consommables est réduite. Ça permet aussi et surtout de lutter contre la corruption. Vous savez que le contact physique milite en faveur de la corruption. D’ailleurs si vous venez aujourd’hui au Ministère du Travail et de la Fonction Publique, si vous étiez habitués à fréquenter ce ministère par le passé, vous verrez qu’aujourd’hui, c’est clairsemé. Quelqu’un a été surpris de ce qu’il a constaté et m’a demandé si les agents sont en grève, je lui ai répondu non, les gens sont bien en poste et tout ça, c’est grâce à la dématérialisation. Il y a aussi que le monde est devenu un village planétaire, ce qui permet à notre pays de s’intégrer dans le monde du numérique aussi. Pour les usagers, cela a réduit absolument les tracasseries, ça leur fait des économies parce qu’ils ne sont plus obligés de faire beaucoup de déplacements vers la fonction publique ou le ministère des Finances avant d’obtenir leurs actes ou de constater l’augmentation de leurs salaires. L’autre intérêt aussi, cela permet aux agents de l’État de se consacrer beaucoup plus à leur travail au lieu de faire des navettes, donc d’améliorer leurs rendements. Les risques d’accidents lors des déplacements sont également réduits.

 

Le Système Intégré de Gestion des Ressources Humaines est d’ailleurs en pleine expansion dans d’autres ministères sectoriels comme le Ministère de la Justice ou encore le Ministère des Enseignements Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle. La dématérialisation, finalement ça touche tout, même les pensions. Alors, Madame le Ministre, et si on évoquait maintenant la mise en place de la e-pension ? Ça aussi c’est une innovation, parlez-nous un peu de ça.

 

Avant de répondre à la question, disons que l’extension de la plateforme vers les ministères va se poursuivre cette année et notre ambition, c’est d’arriver à déconcentrer la plateforme de manière à ce que les agents de l’État, les gestionnaires des ressources humaines de l’État puissent travailler sur site. Comme je l’ai dit tantôt, le système est également connecté au système des gestion des pensions. Nous avons e-pension bien évidemment en relation avec le Ministère de l’Economie et des Finances. Ma première préoccupation en arrivant à la tête du ministère, c’était de faire en sorte que les pensionnés puissent avoir leurs carnets de pension le jour de l’admission à la retraite et cela parce que, l’agent qui est admis à la retraite, il perd non seulement les indemnités mais également le salaire. S’il ne lui reste que la pension qui fait 80% du salaire et qu’il ne l’a pas à bonne date, vraiment, on l’envoie à la mort. Malheureusement, nos efforts dans ce sens sont confrontés à une petite difficulté, l’état des archives. Si non, tel que nous avons pris le problème à bras le corps, mon collègue des Finances et moi-même, tous les retraités devraient avoir leurs carnets le jour de leur départ à la retraite. Mais vous savez, la liquidation d’une pension appelle la constitution d’un dossier, un dossier de trente et une (31) pièces. Malheureusement, l’administration qui génère les actes de carrière ne les a pas bien conservés. Nous sommes parfois obligés d’attendre que ce soit le pensionné qui nous donne copie des actes que nous avons produits. D’autres n’ont pas bien conservé leurs actes de carrière. Ils ne savent même pas leur importance. Au niveau des ministères sectoriels aussi, l’état des archives ne permet pas de disposer de la totalité des pièces qu’il nous faut pour pouvoir permettre au Ministère des Finances de liquider la pension. Donc au niveau de mon ministère, nous avons essayé de réhabiliter les archives et de les moderniser, ce qui a permis de commencer par remettre à bonne date les carnets de pension. Mais, il y a certains qui continueront de se plaindre tout simplement parce qu’il y a des actes qui nous manquent et les pensionnés n’en possèdent pas non plus, ce qui fait que ça traîne, le temps d’approfondir les recherches. Toutefois, pour la majorité des retraités aujourd’hui, ils ont leurs carnets de pension à bonne date mais il y a certains, surtout les plus anciens, parce que vous savez, l’informatisation a pénétré le ministère en charge des finances dans les années 99-2000. Donc tous ceux qui travaillaient avant, ils ont des problèmes de liquidation de pension. C’est ça qui fait d’ailleurs qu’aujourd’hui, au niveau de la fonction publique, tous les actes qui sont pris sont en même temps numérisés pour constituer des archives. On continue de réfléchir pour trouver de solution aux situations antérieures.

 

Mais justement, par rapport à cette préoccupation, qu’est-ce que vous êtes en train de faire dans votre ministère pour corriger cela parce qu’il y a des gens qui attendent toujours ?

 

Nous avons consacré des agents à la recherche des actes de carrière mais, nous envisageons aussi de faire une opération en invitant les fonctionnaires de tous les départements à déposer les actes dont ils sont en possession. Nous allons mener cette opération qui nous permettra de renforcer la base des données afin de pourvoir faciliter la délivrance des carnets de pension. Mais par rapport au passé, il y a du mieux. Au ministère, nous sommes en train de créer un espace retraite pour que lorsque les pensionnés arrivent, qu’ils soient bien reçus.

 

Avec la célérité dans le traitement des dossiers, peut-on dire que la fin du calvaire pour tous les agents admis à faire valoir leurs droits à la retraite est proche et très proche ?

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Absolument ! je puis vous dire que le Chef de l’État accorde une importance particulière à la résolution de ce problème. Le Chef de l’État souhaite que tous les retraités puissent entrer en possession de leurs carnets de pension le jour de leur départ à la retraite et a instruit d’ailleurs le Ministre en charge du numérique de nous accompagner pour qu’il en soit ainsi. Mais le plus gros problème, ce sont les archives mais on continue de travailler, mon collègue des Finances et moi-même.

 

Alors, Madame le Ministre, la retraite, c’est aussi le versement des cotisations sociales, ce qui constitue d’ailleurs, un véritable problème aujourd’hui. Où est-ce qu’on en est ?

 

Le problème qui s’est posé à un certain nombre d’agents contractuels de l’État, c’est que la nouvelle loi portant statut de la Fonction publique les a tous reversés au FNRB pour leurs pensions. Ils sont tous devenus agents de l’État et sont soumis au régime du FNRB pour leurs pensions. Secundo, la loi a modifié les dates d’admission à la retraite. Par le passé pour ce qui concerne les Agents Contractuels de l’État, étant soumis pour leurs pensions au régime de la CNSS, c’est l’âge de 60 ans qui était le critère de départ à la retraite. Donc il n’y avait pratiquement pas de problème au niveau du versement de leurs pensions mais comme ils sont devenus agents de l’État, il y a eu une stratification des âges. C’est 60 ans pour les agents de la catégorie A, 58 ans pour les agents de la catégorie B, 55 ans pour les agents des catégories C et D. Du coup, les Agents Contractuels de l’État qui, à la date de la promulgation de la loi avaient selon leurs catégories, 58 ans, 55 ans, ont été admis à la retraite. Ils ne sont pas affiliés au régime de la CNSS mais les cotisations ont été versées à la CNSS. Ils ont des difficultés à percevoir leurs pensions au niveau du FNRB puisque leurs cotisations n’ont pas été retenues au niveau du Ministère de l’Economie et des Finances. Il y a eu vraiment beaucoup de problèmes. Le Chef de l’État a alors décidé que le budget national puisse verser leurs cotisations sur le temps qui leur reste à passer pour avoir les 60 ans, de manière à ce que la CNSS puisse leur verser la pension immédiatement. Pour ça, l’État doit débourser deux milliards sept cents millions (2 700 000 000) mais c’est réparti sur plusieurs années. Je salue tous les collaborateurs du Ministère du Travail et de Fonction Publique et ceux du Ministère de l’Economie et des Finances qui ont travaillé ardemment sur le dossier et aujourd’hui ces agents ont commencé par toucher leurs pensions. Au moins plus de la moitié a déjà touché la pension. Le reste, ça se poursuit. C’est un ouf de soulagement pour ces agents-là. Le problème à ce niveau est réglé.

 

Mais est-ce qu’il y a un mode pour que l’agent même de l’Etat puisse se rassurer de ce que, il y a eu de versement de ses cotisations sociales ?

 

A moins de suivre ! ce problème, au niveau des fonctionnaires ne se pose pas parce que l’employeur c’est l’État donc la part « employé » est retenue sur le salaire avant d’être versée. Il ne pose pas problème. C’est pour les agents contractuels que ce problème là se pose. Pour gérer la suite de ce problème-là, nous avons mis en place une Cellule de Coordination CNSS-FNRB pour que les agents n’aient pas de problèmes à toucher leurs pensions.

 

Madame le Ministre, nous sommes au Temps des Moissons quatre ans après. Sans vouloir faire du cas par cas, permettez-nous d’aborder la situation des 2500 agents en attente de reversement en ACE depuis 2008. Où en sommes-nous véritablement ?

 

A l’avènement du nouveau régime, il est apparu nécessaire de suspendre les reversements parce que c’était un fourre-tout. Vous avez suivi lorsque nous avons fait l’audit, il y a plus de cinq mille qui n’étaient pas éligibles au reversement mais qui ont été reversés. Donc, on a suspendu les reversements mais çà a été repris. Nous avons élaboré la liste de ceux qui sont en attente de reversement et le Conseil des Ministres l’a adoptée. Sauf les agents dont les cas ne sont pas bien clarifiés, la plupart des agents ont déjà leurs actes de reversement parce que nous avons dû faire des travaux déportés pour permettre aux agents de se concentrer sur ce travail pour que la promesse du Gouvernement d’accélérer les reversements ne soit pas un vain mot. On a pratiquement fini. Il y a quelques cas que nous continuons de résoudre parce qu’il y a des gens dont les situations ne sont pas très claires. Nous mettons à contribution leurs administrations et eux-mêmes, pour qu’ils nous donnent un certain nombre de documents qui prouvent qu’ils sont vraiment éligibles au reversement.

 

Autre aspect important des reformes, c’est la formation des cadres de l’administration publique. Quelle est la place que vous réservez à la formation au sein de l’administration ?

 

La formation des agents de l’administration est une obligation pour leur employeur, l’État. Mais il s’est fait que, en 2005-2006, l’État était confronté à un certain nombre de difficultés, ce qui l’a d’ailleurs amené à signer un Programme d’Ajustement Structurel, des mesures avaient été prises et pour compter du 1er janvier 2007, l’État avait supprimé le financement des formations. Autres problèmes, les formations n’étaient pas programmées. Or, dans une organisation, il faut programmer les formations parce que cela induit une incidence financière. Il faut avoir besoin d’un certain niveau, d’un profil, avant d’accepter que l’agent aille se faire former pour ce profil-là. Mais on a constaté qu’’il y a eu un peu de laisser-aller où les agents vont se faire former sans tenir compte des besoins de l’administration et le Chef de l’État, avec tout ce qui se passe, a demandé qu’on puisse faire l’état des lieux. Il y a un document de politique de la formation continue des agents de l’État qui a été élaboré avec un plan d’action qui permettra d’encadrer les formations. Et les points essentiels dans ce plan de formation c’est qu’il faut que nous puissions mettre en place un mécanisme de formation. Nous envisageons également de créer un centre de formation des agents des catégories C et D parce que quand ils sont recrutés, ils ne subissent aucune formation. Donc avec l’adoption de ce document de politique de la formation continue des agents de l’État, je crois qu’il y aura un peu plus d’ordre dans la formation des agents de l’État.

 

Alors, un agent qui va se faire former lui-même, est-il en faute ?

 

S’il ne réclame rien à l’État, il n’est pas en faute. Mais revenir et exiger qu’il soit reclassé, l’administration n’a peut-être pas besoin de son profil parce qu’eux-mêmes ne tiennent pas compte des profils de leur administration d’origine. On n’a pas besoin de ce profil ou le moment n’est pas venu de l’utiliser mais quand ils reviennent et exigent leur reclassement, c’est là que nous avons quelques problèmes avec eux et aujourd’hui, ils sont près de trois mille.

 

Parlons maintenant de dialogue social, le 1er mai vous allez encore recevoir la plateforme revendicative des organisations syndicales. Quels sont aujourd’hui vos rapports avec ces organisations syndicales ?

 

Nos rapports sont au beau fixe. Le Chef de l’État fait beaucoup d’effort parce qu’il les reçoit en cas de besoin. Je crois qu’il les a déjà reçus trois fois depuis qu’il est arrivé au pouvoir. Au niveau du Ministère du Travail et de la Fonction Publique, nous gardons de très bonnes relations avec les organisations syndicales. L’État a formalisé le dialogue social parce que nous avons signé la charte nationale du dialogue social avec six centrales et confédérations syndicales, le patronat et l’État et nous avons mis en place le Conseil National du Dialogue Social. Il y a une commission intitulée Commission Nationale de Concertation et de Négociation Collective Gouvernement, Centrales et Confédérations Syndicales. Les textes prescrivent que cette Commission tienne deux sessions ordinaires par an et des sessions extraordinaires en cas de besoin. Nous tenons régulièrement les deux sessions. C’est vrai qu’une bonne partie des revendications a un coût mais l’Etat fait de son mieux puisque tout récemment, nous avons octroyé des indemnités aux enseignants de la maternelle, du primaire et du secondaire, je dirai que ce n’est pas rien.

 

Alors, toutes ces vagues de réformes qui s’emparent de votre ministère, est ce qu’elles suffisent pour faire de l’administration Béninoise une administration moderne, smart, et donc de développement ?

 

La perfection n’est pas de ce monde. Je dis toujours à mes agents, les agents métiers, les informaticiens qui parfois se satisfont de ce qui a été fait, que tant qu’il reste à faire, rien n’est encore fait. Nous devons renforcer tout ce que nous avons fait jusque-là. Nous avons développé trente-cinq modules dans le cadre de la gestion de la carrière, il reste encore des modules que nous devons développer. Nous devons déployer le système de gestion dans tous les ministères et pour permettre aux agents de l’Etat d’accéder rapidement à l’information, nous avons mis dans le hall du ministère, deux bornes informatiques de renseignements et nous comptons, courant année 2020, en mettre au niveau de vingt communes, en tenant compte de l’effectif de leurs populations. Nous devons continuer de travailler sur les pensions pour permettre à tous de pouvoir obtenir le carnet de pension à bonne date.

Mais qu’il vous souvienne que jusqu’à une époque très récente, l’Etat perdait tous ses procès devant les tribunaux, tous les procès administratifs. Lorsqu’il y a un contentieux, systématiquement, l’Etat perd. Alors, nous avons réfléchi au niveau du ministère, nous avons procédé au renforcement des capacités des agents de la direction qui gère le contentieux de l’Etat. Nous avons acquis des ouvrages pour leur permettre surtout en ce qui concerne les jurisprudences, de s’informer et nous avons également des personnes ressources qui les appuient dans l’élaboration des mémoires. Je puis vous dire que nous avons eu dix procès devant la Cour Constitutionnelle et nous en avons gagné neuf. En ce qui concerne les contentieux devant les tribunaux administratifs, de 2018 à 2019, nous avons gagné presque tous les procès et cela fait plus de cinq milliards de CFA, le quantum des dommages exigés par les agents concernés. C’est également une forme d’amélioration de la gouvernance et je salue ici mes agents qui s’attèlent à cette tâche. L’informatisation, la dématérialisation, la modernisation, il faut l’accepter sinon, on va vous mettre de côté. Ce n’est pas moi, c’est le système qui va nous mettre de côté parce qu’on ne peut pas se passer désormais des nouvelles technologies dans notre administration.

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